Quand le ministre de l'Intérieur, visiblement surpris par la question qui lui a été posée sur la création d'un parti politique par Madani Mezrag, l'ancien chef de l'armée islamique du salut (AIS), avait improvisé sa réponse, il croyait sans doute s'en tirer à bon compte. C'est qu'en s'en tenant «aux faits», il était convaincu de fournir une explication qui tienne la route sans vraiment se mouiller dans une «histoire» qu'il n'était manifestement pas prêt à aborder sur le fond. Alors, M. Nouredine Bedoui a fait ce qu'il pouvait faire. De «le gouvernement ne réagit pas sur la base de déclarations faites par les uns et par les autres» à «la République est gérée par des lois et ces lois s'appliqueront dans toute leur rigueur», en passant par «Madani Mezrag n'a pas déposé de dossier pour demander l'agrément de son prétendu parti politique», le ministre de l'Intérieur ne croyait certainement si bien dire en croyant… ne rien dire. Parce que, voyez-vous, Monsieur le ministre, non seulement le gouvernement est en devoir de «réagir sur la base de déclarations faites par les uns et les autres», mais il le fait régulièrement. A la tête du client, il est vrai ! Pourtant, il y a de «la matière», quand un terroriste, même pas repenti, puisqu'il continue à revendiquer ses massacres qu'il formule même comme fondement de sa légitimité politique, a l'intention de créer un parti politique. Dans sa formulation absconse, on ne sait pas si M. Bedoui situe Madani Mezrag dans les «uns» ou dans les autres, mais ce n'est pas important, on sait maintenant quand le gouvernement réagit et quand il ne le fait pas. Voilà pour les «habitudes» réactives du gouvernement, telles que suggérées par le ministre de l'Intérieur, à l'occasion porte-parole. Pour la République qui serait donc «gérée par des lois qui s'appliquent dans toute leur rigueur, une fois revenus du sourire au coin de la lèvre que cela suscite à chaque fois qu'on entend ça, le ministre de l'Intérieur aurait tout de même pu en profiter pour «réagir», même si le terroriste Madani Mezrag n'a pas (encore) déposé de dossier pour «l'agrément de son prétendu parti» : «Le droit de fonder un parti politique, de prendre part à sa fondation ou de faire partie de ses organes dirigeants est interdit pour toute personne responsable de l'instrumentalisation de la religion ayant conduit à la tragédie nationale. Ce droit est interdit également à quiconque ayant participé à des actions terroristes et qui refuse de reconnaître sa responsabilité pour la conception, la conduite et l'exécution d'une politique prônant la violence et la subversion contre la Nation et les institutions de l'Etat» (article 5 de la loi organique du 12 janvier 2012 relative aux partis politiques). Et si Madani Mezrag n'a pas encore déposé son dossier, il va quand même le faire. Parce que, voyez-vous, Monsieur le ministre, lui n'est pas du tout convaincu que la loi s'applique dans toute sa rigueur. Enfin pas toujours, et les états jurisprudentiels le situent plutôt du bon côté en la matière. Sinon, il n'aurait pas fait mieux que déposer un dossier d'agrément : en anticipant par l'organisation d'une université d'été ! Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.