L'avocat se plaint de menaces, d'insultes de la part d'un greffier, ancien dans la profession. Seulement, le témoin atten-du était sur un bâteau. Marin de son état, il a préféré rejoindrel'autre rive où peut être un être cher l'attend. Malgré les coups et blessures reçus, la victime avait estimé superflu l'établissement d'un certificat médical. Mais l'histoire de menaces, d'insultes a fait que derrière, la rancune, la rancœur étaient au rendez-vous. «La victime m'avait craché au visage depuis la voiture car il n'avait pas digéré la relaxe obtenue dans un dossier qui nous a divisés», a dit l'inculpé vite rappelé à l'ordre par Nadia Amirouche, la présidente qui a réclamé le fameux témoin susceptible d'éclairer le tribunal. Absent, le témoin ! Maître Tahar Kheiar demande un renvoi... La présidente refuse avant de demander à l'inculpé de se calmer. Maître Kheiar s'accroche à la présence du témoin, un marin actuellement en haute mer, mais va aux faits : «Il y a eu insultes, injures et menaces. Les termes vous ont été répétés par la victime qui demande toujours sous le coup d'un passage à l'acte. Le témoin est venu confirmer les délits avec les termes appropriés. Vous les avez sous les yeux», a dit l'avocat qui a réclamé le dinar symbolique. Pour l'inculpé, maître Mohamed Demsila, offusqué par l'attitude inconvenante de son client a réussi à maîtriser ses nerfs pour plaider le seul droit. «Cette affaire où il n'y a qu'un seul témoin est sombre. Il faut au moins deux témoins. Mon client n'a pas réussi à se faire défendre par les avocats d'Alger alors que son adversaire en a cent ! C'est injuste». Comme souligné en début de chronique, la victime est un avocat et l'inculpé un... greffier. Le comble, c'est cette risible anecdote de l'unique témoin qui avait déposé pour prendre le bateau car marin de son état, et ce mardi 10 h, au moment où Amirouche avait pris le «maquis» derrière son pupitre, le témoin-marin lui, voguait sur les flots de ce mardi 2 juin 2009. La présidente de la section correctionnelle a tout fait pour dédramatiser les faits et a tenu jusqu'au succès des débats l'audience en main en ne permettant aucun écart surtout que le vieux brisard de greffier qui n'a probablement pas supporté son statut d'inculpé ne s'était pas retenu pour crier à la face de l'avocat victime de menaces et d'insultes : «Je t'ai balayé dans une première affaire. Tu n'as pas gagné et c'est ce qui ce te fait mal !» La magistrate a eu cinq secondes pour faire cesser ce débordement qu'aucun magistrat n'admet et ne supporte jamais, la police de l'audience étant du seul ressort du juge du siège ; et aujourd'hui, il s'agit de Amirouche qui va renvoyer dos à dos les antagonistes en annonçant la mise en examen du dossier. L'inculpé quittera la salle d'audience en s'écriant à l'intention de la cinquantaine d'avocats dont la moitié était en guise de soutien au confrère injurié et menacé. Il laisse sortir de ses cordes vocales : «Allah est mon seul avocat; il saura s'y prendre». Maître Kheiar, le membre du Conseil de l'ordre avait souri en murmurant : «c'est une question de déontologie et d'honneur de la profession. Les greffiers sont nos alliés et amis de toujours». N'empêche que le greffier a dû aller à M'sila en chercher.