Amar Saâdani frappe fort et s'en prend à Ahmed Ouyahia, une rare violence qu'il n'a jamais employée jusqu'à maintenant. Il ira jusqu'à douter de son honnêteté envers Abdelaziz Bouteflika, déclarant qu'il lui est infidèle. Le secrétaire général du Front de libération nationale (FLN) semblait «déchaîné», hier, tirant sur tout ce qui bouge, notamment son allié au sein du gouvernement et l'opposition qui tient aujourd'hui son congrès dit de «Mazafran II». «J'ai dis et je le repère : Je n'ai pas confiance en la personne d'Ahmed Ouyahia. Cet homme n'est pas fidèle au président de la République», a lâché le patron de l'ex-parti unique, invité du Forum de la Radio nationale. Saâdani, remonté contre son partenaire au gouvernement, ne semble pas avoir digéré le fait que ce dernier décide de ne pas adhérer à son projet de front de soutien au chef de l'Etat. Le SG du FLN ne s'arrêtera pas là, lui, qui est déjà en guerre ouverte avec Ouyahia. Mais cette guerre a désormais atteint le point de non retour entre les deux hommes, car pour Amar Saâdani, celui qui occupe actuellement le poste de directeur de cabinet de la présidence de la République «est quelqu'un qui veut se porter candidat à l'élection présidentielle de 2019». Sa tactique, dit-il, consiste à appeler à la constitution d'une alliance ou d'une coalition gouvernementale ; «une politique révolue», assène l'orateur qui estime le soutien du FLN à Ouyahia comme «une erreur politique» à ne pas commettre. En tout cas, l'acharnement du patron du FLN sur le RND est d'une rare violence, à tel point qu'il rappelle les propos avec lesquels il s'en était pris à l'ex-homme fort du DRS, le général Mohamed Mediene, dit Toufik en 2014. Est-ce le début de la fin pour Ahmed Ouyahia qu'on dit avoir été rappelé au sérail et placé au palais d'El Mouradia pour maintenir les équilibres ? Ce n'est, en somme, que l'une des interrogations qui tournent autour de celui qu'on nomme l'homme des sales besognes. Et pour consommer le clash avec lui, Amar Saâdani n'hésitera pas à lâcher un autre pavé à la fin de l'émission radiophonique. «C'est le divorce avec Ouyahia, pas le RND !», a-t-il déclaré devant l'insistance des journalistes. Comme si l'invité de la radio n'avait pas assez tiré sur sa cible préférée depuis quelque temps. En effet, à propos de l'absence du Rassemblement national démocratique au meeting d'aujourd'hui à la Coupole du complexe olympique Mohamed-Boudiaf, le SG du FLN dira qu'il s'agit «d'une absence personnelle» et n'engage pas les cadres de ce parti «nombreux à être présents». D'ailleurs, «Ouyahia est désavoué par ses militants», soutient l'orateur qui se dit «prêt à lui céder la place pour diriger les travaux du meeting». «S'il est avec le président, notre initiative a pour objectif de soutenir son programme et s'il soutient l'armée, cette initiative l'est aussi», s'est étonné Saâdani, et d'ironiser que le chef du RND «vit toujours dans les années 1990». La seconde cible préférée du patron de l'ex-parti unique n'est autre que l'opposition. Cette dernière, qui tient ce matin à Zéralda sa deuxième conférence pour la transition démocratique, «ne cherche rien d'autre que la chaise de la présidence», a-t-il dit. «Renforcer un front interne fragile» L'opposition, ajoute l'orateur «n'a pas de programme et ne se soucie que des élections, oubliant les questions les plus importantes telles que la crise économique, l'insécurité et le terrorisme». Pour Amar Saâdani, le pouvoir a tendu la main et «a trop attendu un retour des partis de l'opposition». Mais, les élections législatives sont prévues en 2017 et les présidentielles en 2019, rappelle-t-il encore. Avant de défendre son initiative qui regroupera à la coupole «plus de 22 000 personnes». Ce rassemblement, explique Amar Saâdani, «n'est pas opposé à celui de l'opposition mais intervient uniquement en même temps». L'objectif final étant de «laisser le peuple juger par lui-même». Rappelant les principes fondateurs de l'initiative dite «pour le progrès dans la cohésion et la stabilité», l'invité de la radio met en garde contre les dangers qui guettent le pays sur le plan sécuritaire notamment, «d'où la mobilisation citoyenne indispensable». Au-delà de ce 30 mars, explique le même orateur, des rassemblements locaux seront organisés aux quatre coins du pays, «pour renforcer le front». «Les membres des partis et associations iront à la rencontre des citoyens dans les wilayas pour sensibiliser, mobiliser et expliquer le contenu de l'initiative», fera savoir Saâdani qui n'hésite pas à lier la tenue du meeting à la conjoncture difficile que vit l'Algérie, sur le double plan sécuritaire et économique. «Il y a un plan qui vise les pays du Maghreb. Ses concepteurs sont ceux qui ont détruis l'Irak, la Libye et la Syrie et après en avoir fini avec le Moyen-Orient, voilà qu'ils cherchent à s'en prendre à nous et à nos voisins», déclare le patron du FLN qui s'interroge ironiquement «si la démocratie n'est absente que dans le monde arabe ?». Qualifiant «d'automne de la destruction arabe», ce qui est considéré communément comme «printemps», Amar Saâdani estime que «l'armée est sur tous les fronts sur les frontières avec la Tunisie, la Libye et le Mali». «Aucun terroriste ne pourra sauver sa tête s'il venait à pénétrer dans le territoire national et il n'y aura pas de second Tiguentourine», prévient-il, avant d'attirer l'attention sur «la fragilité du front interne».