Portail principal de l'université Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou. Les premiers marcheurs arrivent par petits groupes dès 9h du matin et se rassemblent pour marquer cette date phare, avant de battre le pavé et commémorer ce double anniversaire du long combat identitaire, à savoir le Printemps berbère d'avril 1980 et le Printemps noir 2001. Deux marches, deux appels. Les marcheurs ayant répondu aux deux appels lancés par le RCD et le MAK se scindent en deux blocs, chacun de son côté, dans un respect mutuel et surtout dans un grand calme. Aucune tension n'était perceptible. Les éléments des services de sécurité présents seulement en uniforme civil étaient très discrets. Aucun dispositif n'a été déployé. C'est dire que tout ce qui a été rapporté sur de probables dépassements et une forte tension n'étaient que des visions erronées. Même les magasins longeant l'itinéraire des deux marches sont demeurés ouverts. De leur côté, les organisateurs ont appelé, à plusieurs reprises, l'assistance à la sagesse pour assurer le bon déroulement de la manifestation. RCD : «Pour une officialisation effective de tamazight» Ils étaient des milliers à converger vers ce lieu hautement symbolique. C'est la marche du RCD qui s'ébranle la première, peut avant 11h. Aux premières loges, le fondateur et ex-président du RCD, Saïd Sadi, l'actuel président du parti, Mohcine Belabbès et l'infatigable Me Ali Yahia Abdennour et un grand nombre de sympathisants et élus locaux de cette obédience politique. Les manifestants ont emprunté le chemin vers la placette du stade du 1er-Novembre pour rejoindre la rue Abane-Ramdane du centre-ville de Tizi Ouzou en scandant des slogans comme «La Kabylie n'est pas à vendre», «Pour une officialisation effective de tamazight» ou encore «A vous les hydrocarbures et à nous l'Histoire» et bien d'autres encore. Les manifestants ont aussi dénoncé l'austérité qui ronge la capitale du Djurdjura. «Nous dénonçons l'annulation des projets structurants de la wilaya», criaient-ils haut et fort. Devant la placette du Musée de la ville (ex-mairie) sise au centre-ville où a abouti la marche du RCD, Mohcine Belabbès a affirmé que l'objectif de cette manifestation est de demander à ce que tamazight soit une langue de l'Etat et officielle d'une manière effective. Pour cela, il a plaidé pour que cette langue soit une constante nationale, comme il a appelé le peuple algérien à unifier les rangs pour la sauvegarde de la liberté du pays. Au sujet relatif au mouvement de l'autonomie de la Kabylie, le même responsable a affirmé que son parti refuse catégoriquement cette autonomie de la région. Le président du RCD a, en outre, accusé le pouvoir d'être à l'origine de la situation chaotique qui prévaut dans le pays. «Ce pouvoir est criminel, puisqu'il viole les droits de l'Homme. Ajoutez à cela, les affaires de corruption qui ont défrayé la chronique ces derniers jours. Pis encore, ce pouvoir refuse à ce que la justice soit indépendante de l'administration», a-t-il accusé. C'est pour cela qu'il est temps «d'aller vers une période de transition en Algérie», a-t-il insisté sous les applaudissements de l'assistance. De son côté, le militant des droits de l'Homme, Ali Yahia Abdennour, a affirmé que le système politique doit disparaître. «Il faut qu'il parte. Le territoire algérien appartient au peuple algérien», a-t-il clamé. Notons que vers 12h30, les manifestants se sont dispersés pacifiquement et dans un climat fraternel. Le MAK a drainé des milliers de marcheurs Après la marche du RCD, place à celle du MAK qui a drainé, faut-il le souligner, plusieurs milliers de marcheurs. Beaucoup plus nombreux que ceux du RCD, les marcheurs du MAK, qui ont suivi le même itinéraire que la marche de leurs «frères ennemis», ont scandé des slogans hostiles au pouvoir avec leur mot d'ordre traditionnel, à savoir l'indépendance de la Kabylie. «Pour une Kabylie libre et indépendante», «Pour l'autodétermination du peuple kabyle», «Je suis kabyle, je revendique mon indépendance», lit-on entre autres sur les nombreuses banderoles et pancartes déployées par les marcheurs. Une marche marquée contre toute attente par la présence de l'ancien numéro 2 du RCD, Noureddine Aït Hamouda, en rupture de ban avec son ancien parti et qui s'est déroulée dans un climat serein. La marche du MAK, tout comme celle du RCD d'ailleurs, n'a vu aucun dispositif sécuritaire particulier déployé et les marcheurs se sont dispersés dans le calme. Un climat serein et pacifique qui a donné un cachet festif à cette célébration marquée également par d'intenses activités officielles organisées un peu partout à travers la wilaya de Tizi Ouzou. C'est le cas de la maison de la culture Mouloud-Mammeri qui a connu, hier, une effervescence particulière. Sous l'égide de la direction de la culture locale, des ateliers de dessins pour enfants, des récitals poétiques et des projections de films ont été présentés au public, notamment les enfants venus nombreux, profiter de cette journée sans école, pour assister aux festivités d'un Printemps berbère plus beau que jamais.