«Chakib Khelil est chez lui. Rebrab est la source du problème dans l'affaire El Khabar. Mehenni est un mercenaire. L'opposition n'est pas un crime. Le spectre de l'endettement extérieur plane et la présidentielle est fixée pour 2019.» Ahmed Ouyahia n'a pas été avare en déclarations hier à l'occasion d'une conférence de presse animée à Alger. Le secrétaire général du Rassemblement national démocratique (RND), qui sortait d'un congrès qui l'a conforté, a fait le tour de toutes les questions d'actualité, allant jusqu'à dire tout haut ce que d'autres pensent tout bas. D'emblée, Ouyahia qualifiera le congrès extraordinaire du parti de «saut qualitatif», d'autant qu'il a confirmé, selon lui, ses positions de principe et consacré la démocratie à travers l'urne. Avant de s'exprimer sur l'absence du secrétaire général du FLN. «Je n'ai pas de lecture à faire sur l'absence de mon frère Amar Saâdani. Moi-même, je n'étais pas présent au 10e congrès de son parti. Mais le FLN était représenté par des cadres de sa direction nationale», s'est contenté de préciser Ahmed Ouyahia, qui assure «n'avoir aucun problème personnel avec Saâdani». Bien au contraire, il en veut pour preuve le fait qu'ils partagent «environ 80% des positions», notamment «l'élection présidentielle prévue pour 2019». Conflit avec Saâdani : «C'est du passé !» Devant les graves accusations du patron du FLN, Ouyahia préfère tourner la page. «Amar Saâdani a dévié, auparavant, sur ce qui était attendu de lui. Désormais, c'est du passé !», a commenté le conférencier qui n'hésitera pas, encore une fois, à qualifier l'ex-parti unique «d'allié stratégique». Mais, ce n'est pas pour autant que les deux partis suivent la même méthodologie de travail, tient-il à préciser, car le RND refuse toujours de s'associer au projet «rempart national» du FLN. «Nous pouvons nous rassembler un jour autour d'une cause de circonstance. Mais pas avec une quarantaine de partis pour un travail festif», a assené le SG du RND, qui se dit pour «un travail de coordination au sein des institutions entre les partis de la majorité». Une allusion à son projet de réhabilitation de l'Alliance présidentielle, rejeté par Saâdani. «Mehenni est un mercenaire» Le patron du RND sera plus virulent lorsqu'il est appelé à s'exprimer sur ces forces étrangères qui veulent régler leurs comptes avec l'Algérie. Rappelant ses origines, «fils du village de Bouadnane en Kabylie», Ahmed Ouyahia dira que cette région «est une partie intégrante de l'Algérie». «Nous respectons les différences, mais la patrie est sacrée», tranche-t-il, avant de s'attaquer violemment au leader du Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK). Et d'enchaîner : «Je considère que Ferhat Mehenni, malheureusement, parce c'est un fils de chahid, s'est trouvé à son âge avancé, comme étant un mercenaire au service d'une cause étrangère et non pas d'une prétendue cause de la Kabylie.» Une première pour le patron du RND de citer nommément le leader du MAK qui s'est allié dernièrement au sinistre Bernard-Henri Lévy, un personnage impliqué dans la déstabilisation de plusieurs pays voisins. «Les gens sont différents certes de Tizi Ouzou à une autre région, mais personne ne pourra duper le peuple sur l'unité nationale», insistera-t-il. Sur le retour de Chakib Khelil et sa tournée à travers les zaouias, le secrétaire général du RND n'a pas voulu s'étaler beaucoup, rappelant qu'il avait consacré 14 minutes au sujet. Pourtant, il dira que «ce monsieur est chez lui. Point barre». Rebrab «a politisé l'affaire El Khabar» ! Autre sujet, l'affaire dite d'El Khabar. Dans ce conflit, si Ouyahia a salué «un journal professionnel qui s'est imposé après avoir payé un lourd tribut et un acquis pour l'Algérie», il ne s'empêchera pas de tirer sur l'homme d'affaires Issad Rebrab sans pour autant le nommer, l'accusant d'avoir «politisé» le conflit. «C'est bien lui qui a déclaré que le pouvoir doit partir. Or, je fais partie de ce pouvoir. Je ne vais quand même pas applaudir», a répondu le conférencier. Il ajoute, après insistance : «Je n'ai pas à commenter une affaire qui est devant la justice.» «Il y a risque à recourir à l'endettement extérieur» Par ailleurs, à une question sur les demandes de repentance à la France pour ses crimes coloniaux, l'orateur pense que «la solution ne se situe pas dans les excuses». «La meilleure revanche à prendre sur le colonialisme est de bâtir au mieux un grand pays», estime Ouyahia, qui qualifiera, une fois de plus, le tweet de Manuel Valls de «très indélicat». Concernant l'opposition, il dira : «Je ne serai pas un militant d'un parti si je considère qu'elle est un crime.» Mais parfois, ajoute-t-il, «elle va trop loin, alors qu'il y a des sujets dont nous avons intérêt à débattre». Enfin, et sur le plan économique, le directeur de cabinet de Bouteflika n'a pas utilisé la langue de bois, estimant que «le risque de recourir à l'endettement extérieur plane toujours si les choses restent en l'état». La solution, selon Ahmed Ouyahia, «est de réhabiliter le travail, d'introduire des réformes de façon à encourager l'investissement, de soutenir la production nationale et d'introduire une souplesse dans le code du travail».