A l'approche des élections législatives du mois de mai prochain, les nouveaux partis politiques, agréés dans le sillage des réformes politiques de 2012, sont en plein désarroi. La nouvelle loi électorale qui impose à tout parti désirant participer à une prochaine élection d'avoir 4% des suffrages exprimés lors d'une précédente élection et qui s'applique avec effet rétroactif les a en effet déroutés. Quelles conséquences et quel sort pour ces partis après mai 2017 ? Tous les dirigeants de cette formation s'accordent à dire qu'ils sont menacés dans leur existence même. «C'est une loi anticonstitutionnelle dont l'objectif est d'éliminer l'opposition crédible et d'empêcher le renouvellement de la classe politique. Cette loi reflète l'état d'esprit du pouvoir qui veut empêcher les nouveaux partis d'émerger», soutient Sofiane Djilali, président du parti Jil Jadid, joint hier au téléphone. Il ajoute qu'avec cette loi, il ne reste au pouvoir que de désigner les députés. «Les nouveaux partis sont étouffés dans l'œuf», a-t-il indiqué. Il prévoit que la prochaine APN sera composée du FLN et du RND en plus des partis qui accepteront de petits quotas. Notre interlocuteur, qui critique aussi la commission indépendante de surveillance des élections en la qualifiant de «commission pour le trafic électoral», a appelé l'opposition à un boycott collectif des prochaines échéances. L'avis de Sofiane Djilali est partagé par le président du Front du militantisme national (FMN), Abdellah Haddad. «On est devant le fait accompli. Nous sommes un parti nouvellement créé. Je vais au Niger pour ramener les 4%», s'est emporté le président du FMN, contacté par nos soins. Déplorant l'application avec effet rétroactif de cette loi, il plaide pour son application à partir des législatives de 2017 dont «la transparence doit être assurée». «C'est une loi discriminatoire envers les nouveaux partis. C'est une hogra», a-t-il lâché. Pour lui, c'est une manière indirecte de retirer les agréments accordés entre 2012 et 2015. «Puisqu'on est dans une période d'austérité, avec cette loi, il serait plus judicieux de désigner les députés pour économiser l'argent avec lequel seront organisées les élections», a-t-il ironisé. Quant à la participation du parti, il affirme que le choix sera laissé aux bureaux de wilaya qui décideront. Acharnement Mais le nouveau parti qui s'est acharné le plus sur cette nouvelle loi électorale reste celui de l'ancien chef de gouvernement, ancien secrétaire général du FLN et deux fois candidat à l'élection présidentielle (2004 et 2014), Ali Benflis. Il a dénoncé à plusieurs reprises cette loi en son nom personnel, au nom de son parti Talaiâ El-Houriyat et au nom du Pôle des forces du changement qu'il coordonne. Dans ses communiqués, il a dénoncé «une violence politique», «une atteinte au pluralisme politique» et «une absence totale de la moindre garantie quant à la sincérité et à la transparence des prochains scrutins». Il a mis en exergue «la détermination et la volonté du pouvoir politique en place de réaliser ses desseins visant à affaiblir l'opposition politique et à redessiner le paysage politique selon ses propres désidératas et ceux de ses clientèles». «A travers le projet de loi organique sur le régime électoral, le régime politique en place se prépare à récupérer d'une main ce qu'il a été contraint de concéder de l'autre en 2012 au moment de la grande panique que les révolutions arabes ont introduite dans ses rangs», a souligné Benflis dans l'un de ses communiqués. En plus des nouveaux partis, le régime électoral sanctionne également les petits partis dont certains sont agréés depuis l'ouverture de 1989. Le président du Mouvement national d'espérance (MNE), Mohamed Hadef, dit craindre les conséquences de cette loi et surtout de la mesure des 4% «anticonstitutionnelle qui n'est basée sur aucun fondement ni juridique ni politique». Pour lui, cette mesure qui favorise le FLN et le RND exclut tous les autres partis. «Son objectif est de laminer les partis», a-t-il dit, affirmant qu'il attend la publication du texte au Journal officiel, tout en gardant une petite lueur d'espoir que le président supprimera la disposition relative aux 4%. «C'est le peuple qui peut sanctionner un parti», a-t-il dit, plaidant pour un statut des partis politiques. Notre interlocuteur se demande «comment dans une conjoncture qui appelle mobilisation et rassemblement des énergies, on est en train d'exclure des millions de personnes».