Née dans le sillage de l'élection présidentielle du 17 avril 2014, la Coordination des libertés et de la transition démocratique (CLTD), qui regroupe les principaux partis de l'opposition, est-elle à bout de souffle ? La question se pose avec acuité, surtout que cette entité politique a disparu des radars depuis plusieurs mois. Les projets de loi adoptés récemment à l'APN, notamment ceux relatifs au code électoral, à l'instance de surveillance des élections et à l'obligation de réserve des militaires n'ont pas suscité ne serait-ce qu'une réaction commune de la Coordination. Les partis qui la composent, à savoir le RCD, le MSP, le Mouvement Ennahda et le FJD de Djaballah se sont contentés de réagir de manière individuelle, condamnant «des projets qui remettent en cause le multipartisme». Malgré toute la tension qui avait régné à l'APN et qui a marqué la scène politique, la CLTD ne s'est pas réunie, provoquant des interrogations sur son utilité, son efficacité et son devenir. Le retrait du parti Jil Jadid, le 1er juin dernier, malgré son manque de représentativité, a porté un coup dur à l'organisation dont les dirigeants se sont rencontrés en urgence autour de cette défection avant de disparaître de nouveau. Le président de Jil Jadid, Sofiane Djilali, avait estimé que la CLTD a atteint ses limites. Mais en réalité, ce n'est pas uniquement la CLTD qui est en perte de vitesse. C'est l'Instance de concertation et de suivi de l'opposition (ICSO), qui regroupe la CLTD, le Pôle des forces de changement et des personnalités qui a plongé dans une profonde léthargie depuis son sommet du 30 mars dernier. A quoi peut servir alors une organisation politique si, dans des moments particuliers, ses membres ne se rencontrent même pas ? Les divergences sur certains points fondamentaux entre ses membres ont-elles fini par avoir raison de cette entité qui avait pourtant suscité beaucoup d'espoir à sa naissance ? «Après le mois de Ramadhan, il y aura quelque chose probablement», indique Naamane Laouer, cadre du MSP, joint hier par nos soins. Il ajoutera que les résolutions du 2e sommet de l'opposition sont appliquées par chaque parti de manière autonome.
Sommeil profond Notre interlocuteur précisera que les groupes parlementaires issus des partis membres de la CLTD ont travaillé ensemble sur les projets de loi présentés par le gouvernement. A l'APN, ces partis ont fortement dénoncé les textes de l'Exécutif, dénonçant, d'une même voix, avec le FFS et le PT, l'expédition de plusieurs projets de loi en un temps très court. Ils ont boycotté la séance de vote du nouveau code électoral et de la haute instance de surveillance des élections. Mais cette dynamique des groupes parlementaires ne peut justifier l'absence de réaction du sommet de l'organisation qui s'est illustrée par sa longue disparition et son sommeil profond. «Après l'Aïd, ça va reprendre inchallah», affirme Naamane Laouer, qui souligne que certains dirigeants de partis membres de la CLTD, à l'instar du président du MSP, Abderrazak Makri, sont absents depuis quelque temps. En tout cas, les échéances électorales de 2017 (législatives du mois de mai et locales du mois d'octobre) mettent sous pression les partis de l'opposition qui se voient compliquer la tâche de la participation après l'adoption du nouveau code électoral qui sera appliqué avec effet…rétroactif. Les 4% des suffrages que doit avoir un parti lors d'une précédente échéance pour pouvoir participer à une prochaine est un véritable obstacle, considéré par certains partis comme une volonté du pouvoir d'exclure l'opposition de la vie institutionnelle du pays. Cet article est encore plus contraignant pour les nouveaux partis. Ils estiment que l'agrément donné sera retiré par la nouvelle loi sur les élections. «A travers le projet de loi organique sur le régime électoral, le régime politique en place se prépare à récupérer d'une main ce qu'il a été contraint de concéder de l'autre en 2012», a affirmé Ali Benflis, président du parti Talaie El Houriyet.