Debza, cette emblématique troupe qui a accompagné la contestation berbère et les combats de la classe ouvrière vient de perdre en Zahir Abdeladim l'une des figures les plus marquantes de son histoire. Après ses études moyennes et secondaires couronnées de succès à l'issue desquelles il obtient son bac, Zahir débarque dans la capitale du milieu des années 1980 où il s'inscrit en pharmacie à l'université d'Alger. «Peu studieux, Zahir était plutôt destiné à une carrière artistique tant l'art coulait dans ses veines. Au collège déjà, il esquissait de magnifiques portraits et jouait merveilleusement de la guitare», raconte Makhlouf Khoukhi, un de ses amis, sous le coup de l'émotion. Avec une bande de copains, il jouait dans les cités universitaires ainsi que dans les centres de formation où des amis l'invitaient. Toute cette volonté ne fera naturellement que lui ouvrir les portes de l'historique troupe Debza dont il se sentait proche. A son arrivée en 1988, la troupe commençait à battre sérieusement de l'aile avec un répertoire usé, et il fallut tout l'engagement musical de Zahir pour insuffler une dynamique aux compositions de cette troupe coincée entre le chaâbi et le folklore. «Grâce à son génie musical et à son talent de guitariste, Zahir commença à dépoussiérer le répertoire de Debza. C'était entre 1988 et 1990», témoigne Mustapha Brahiti, ami intime du défunt et ancien détenu du printemps 1981 que nous avons rencontré lors de la veillée funèbre au domicile des Abdeladim, à Tinebdar. Et ce n'est pas le fruit du hasard si les compositions de Debza furent les plus populaires de l'époque où Zahir dirigeait la troupe. «Son empreinte est sur l'avant-dernier album, Chkoun fina mess'oul (Qui d'entre nous est responsable) et ce, à travers les arrangements qu'il nous proposait», rapporte son ami Rachid Talbi, membre de la troupe Debza également. Tout cet engagement s'est fait au détriment de ses études qu'il peinait à poursuivre, à tel point que Zahir fut menacé d'exclusion. Mais grâce à cette même ténacité légendaire, il parvint à décrocher son diplôme en pharmacie. «Je me souviens que je l'avais sermonné gentiment un jour alors que nous étions attablés du côté de la Grande Poste à propos de ses études, et il me fit la promesse de rattraper son retard. Ce qui fut fait et avec brio», témoigne en sanglots une fois encore Mustapha Brahiti. Avec l'arrivée du FIS, il décida de quitter le pays pour poursuivre ses études en France où il s'était installé définitivement. Il était si absorbé par son travail (il était représentant d'une grande firme pharmaceutique en Europe - ndlr), que Zahir n'est revenu qu'une fois au pays, c'était lors de la perte de son père.«Depuis, nous n'avons jamais eu de nouvelles de lui», dira Makhlou Khoukhi. Atteint d'une maladie rare, Zahir s'est éteint lundi passé à Paris. Il sera enterré aujourd'hui vendredi dans son village natal, Irouflène, dans la commune de Tinebdar, sur les hauteurs de Sidi Aïch. Adieu l'artiste !