Amar Saâdani a-t-il été poussé à la démission ? Tout porte à le croire. Les griefs retenus contre lui ? Ses sorties médiatiques souvent cadencées par des effractions publiques d'une rare violence contre tout ce qui bouge. S'il nous a habitués à tirer dans le tas et allumer un incendie à chacune de ses rencontres avec la presse, force est de constater que les limites ont été franchies ce 5 octobre, lors de sa dernière conférence de presse. Quelque chose a rompu ce jour-là. Saâdani est allé trop loin. Et la maison FLN a été prise par le feu. Les graves accusations proférées en ce début d'octobre par le désormais ex-SG du FLN, contre, pêle-mêle, le général à la retraite Mohamed Mediène, dit Toufik, ou encore Abdelaziz Belkhadem, ancien secrétaire général du FLN et non moins ancien chef du gouvernement, mais aussi contre des moudjahidine accusés d'être «des pantins» de l'ancien chef du renseignement, ont fini par avoir raison d'un Saâdani devenu trop imprudent. Jamais pour mémoire un homme politique, qui plus est issu du FLN, ne s'est permis un tel affront contre notamment l'ex-patron des services de renseignement. Les sanglants événements de Ghardaïa, en 2015 ? C'est le général Toufik qui en était derrière. Les manifestations de In-Salah, déclenchées pour s'opposer à l'exploitation du gaz de schiste ? C'est encore Mohamed Mediene l'instigateur. Ce sera également lui qui est la tête pensante du groupe des 14, des anciens moudjahidine qui ont réclamé le départ de Saâdani. Et c'est lui encore qui a «poussé Rachid Nekkaz» à se présenter à l'élection présidentielle pour «chahuter la candidature du président Bouteflika». L'autre personnalité ciblée cet automne par Saâdani : l'ancien secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem. Ce dernier était, selon lui, un «auxiliaire» de la France coloniale. Pis, la famille de l'ancien chef du gouvernement «a collaboré» avec la puissance coloniale. Des accusations gravissimes qui ne pouvaient plus continuer. Et l'homme qui n'a pas sa langue dans sa poche devait un jour ou l'autre passer au silence. Il aura d'ailleurs fallu l'intervention d'un Ouyahia, chef du cabinet de la Présidence et patron du parti du RND, pour que la tempête provoquée ce 5 octobre par Si Amar s'estompe. C'est Ouyahia qui ira de nouveau prendre la défense de l'ex-patron du défunt DRS. «Les événements de Ghardaïa sont une manœuvre orchestrée de l'intérieur et de l'extérieur du pays. Et quand certains parlent (Saâdani), j'espère qu'ils n'oublient pas que derrière cette personne (le général Toufik ndlr), il y a des milliers d'agents, d'officiers, de sous-officiers et de djounouds. Eux aussi appartiennent à l'ANP», a déclaré le SG du RND, en réponse aux accusations de Amar Saâdani. Réactions: Abderrahmane Belayat : «Saâdani a dépassé les bornes» «Nous avons d'abord déploré que Amar Saâdani soit à la tête du parti depuis 2013. Il ne devait en aucun cas être aux commandes d'un parti comme le FLN. Maintenant, il faut penser à rétablir la légalité au sein du parti, éclaircir certains points restés en suspens depuis 2013 et passer à d'autres étapes. Ce monsieur a violé les textes qui régissent le parti. Il a dépassé toutes les bornes. Le problème n'est pas encore réglé. Il faut donc redorer le blason du FLN. Nous avions dénoncé le 10e congrès qui est illégal et nous demandons au Président de revenir au 9e congrès. Pour ce qui est de la nomination de Djamel Ould Abbes, nous considérons que l'essentiel est dans les actes et ce qu'on peut apporter à la nation.» Hocine Khaldoune, chargé de la communication : «Sa décision est mûrement réfléchie» «La décision de la démission du secrétaire général est mûrement réfléchie. Il a voulu partir avec la conviction d'avoir accompli sa mission. Il l'a fait sans hésitation. Tout a été fait avec diplomatie et respect à la grandeur du parti du FLN. La session ordinaire du comité central s'est déroulée dans des conditions très convenables et les membres ont donné leur accord quant à la démission de Saâdani mais aussi à la nomination de Djamel Ould Abbès, que je respecte énormément. Le départ de Saâdani, comme il l'a précisé, est dû à des raisons de santé. Le secrétaire général a évoqué ses problèmes de santé en expliquant, notamment, que son absence pendant trois à quatre mois était liée à des raisons de santé. Maintenant, c'est une autre étape qui attend le parti qui s'attellera désormais à préparer sa stratégie en vue des prochaines élections législatives.