Les réserves de change de l'Algérie ont baissé à 121,9 milliards de dollars à fin septembre 2016, contre 129 milliards de dollars à fin juin 2016. En l'espace de trois mois, l'Algérie a perdu 7,1 milliards de dollars. Pour les experts, cette situation était prévisible dès lors que les autorités financières ont opté, depuis la chute des prix du pétrole, pour la poursuite du financement du déficit budgétaire par le recours aux réserves financières. A fin 2015, le niveau des réserves était à 144,1 milliards de dollars, a souligné hier le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Loukal, lors de son audition par la commission des finances et du budget de l'APN, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances 2017 par cette commission. A priori, le gouverneur de la Banque centrale voulait rassurer les élus de l'Assemblée populaire nationale sur la solidité financière du pays. Mais lorsqu'on aborde cette question avec Ferhat Aït Ali, expert financier, on comprendra bien que c'est loin d'être le cas. L'effondrement continuel des réserves de change est un indice flagrant, selon lui, de l'absence d'une politique budgétaire et financière alternative. «A ce rythme, je m'interroge comment peut-on dire qu'elles ne baisseront pas en-dessous de 100 milliards en 2019, tel qu'il a été avancé par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, il y a quelques mois», relève l'expert. Notre interlocuteur ne manque pas de signaler que l'Algérie perd en moyenne 1,6 milliard de dollars par mois, ce qui a donné lieu à un déficit de la balance commerciale de l'ordre de 15 milliards durant les neufs mois de l'année 2016. En comptabilisant le déficit de la balance des paiements de l'ordre de 800 millions de dollars, ceci engendre un déficit de 2,4 milliards par mois. L'Algérie risque de perdre au total, pour l'année 2016, plus de 28 milliards de dollars. Il est clair pour ce spécialiste des questions financières que la démarche entreprise par le gouvernement afin de faire face aux dépenses courantes et aux charges dues aux différents projets d'investissements n'est pas viable et indéfendable. Il est aussi hors de question, prévient-il, d'espérer à court ou à moyen termes, la remontée des cours de l'or noir, pour préserver ce «matelas» de devises. «Il nous fait un baril à 90 dollars pour éviter le recours aux réserves de change. Alors que ce niveau de prix est invraisemblable dans le contexte actuel du marché pétrolier caractérisé par une offre abondante et une consommation en berne», a-t-il appuyé. Les instruments financiers pouvant permettre du moins d'éviter le recours systématique aux réserves financières sont, d'après lui, le retour à l'endettement extérieur et à la diversification des modes de paiement des importations. Pour l'endettement, il devra servir, clarifie-t-il, exclusivement les projets d'investissements productifs et non les importations de produits de consommation. Il ne faut pas non plus décider de manière catégorique et radicale de réduire la facture des importations, constituée en grande partie d'intrants et d'équipements destinés à l'outil de production. «Si le gouvernement souhaite réellement préserver les réserves de change et assurer la solvabilité de l'Algérie, il devra trouver les solutions qui s'imposent et entreprendre les réformes», soutient notre interlocuteur. S'exprimant, il y a quelques mois, Abdelmalek Sellal a assuré que le niveau des réserves de change de l'Algérie ne baisserait pas en-dessous de 100 milliards de dollars «quelles qu'en soient les circonstances». Avançant ses prévisions, le Premier ministre s'attend à une amélioration des exportations des hydrocarbures de 35 milliards de dollars en 2017 et 45 milliards de dollars en 2018. Des prévisions qui restent, cependant, très liées à l'évolution du marché pétrolier.