Même avec une situation financière qui s'est nettement dégradée depuis deux ans et demi, le gouvernement ne perd rien de son optimisme. Preuve en est les déclarations du Premier ministre, Abdelmalek Sellal. «L'Algérie va bien, les choses sont stables», avait-il déclaré lors de sa visite à Saïda en août dernier. Certes, il «faudra faire des efforts supplémentaires», reconnaît-il, mais en dépit de l'effondrement du marché pétrolier et la réduction de moitié de la fiscalité pétrolière, l'Algérie «continue d'améliorer ses performances économiques». Un optimisme qui tranche avec la réalité des chiffres. Le solde négatif de la balance des paiements a quintuplé entre 2014 et 2015, alors que le déficit budgétaire a augmenté de 50% durant la même période pour représenter près de 20% du PIB. A la fin du premier semestre de 2016, ce déficit évolue sur le même rythme que celui de l'année dernière quand il avait atteint plus de 3300 milliards de dinars. Les réserves officielles de change se sont contractées à 144 milliards en 2015, perdant 35 milliards de dollars à fin décembre 2015, en baisse de 20% sur un an et la liquidité bancaire a baissé d'un tiers à moins de 2000 milliards de dinars. Les mesures mises en place pour augmenter les ressources de l'Etat donnent des résultats mitigés. Ainsi, moins de 20% du déficit budgétaire a été financé par l'emprunt obligataire pour la croissance économique sur un déficit de plus de 1700 milliards de dinars, à la fin juin 2016, tandis que les trois quarts du déficit sont épongés par le recours au fonds de régulation des recettes. La Banque d'Algérie prévenait dans son dernier rapport de conjoncture fin 2015 qu'une baisse prolongée des prix du pétrole interpelle sur «l'urgence d'une plus forte consolidation budgétaire». Face à l'épargne qui se replie et des efforts de diversification des ressources qui tardent à donner des résultats, la marge de manœuvre du gouvernement se réduit. Mohamed Ghernaout, expert financier, estime que «la croissance économique est trop faible pour susciter l'optimisme». Le gouvernement utilise, selon lui, «un discours électoral avant l'heure», dont l'aspect économique s'est traduit par un «recours à l'endettement interne par l'émission d'obligations du trésor qui a creusé davantage le déficit de l'Etat même s'il reste marginal par rapport au PIB et un appel timide pour l'instant mais qui va devenir inévitable dans quelques semaines à l'endettement externe qu'il avait maudit». Le gouvernement a pris des mesures pour augmenter les ressources hors fiscalité pétrolière comme il en a pris d'autres pour limiter les sortes de devises, mais pour certains experts ce ne serait pas suffisant. «Les trois années à partir de 2016 sont la limite de la marge de manœuvre», soutient un banquier. Son argument : «Le stock des disponibilités et des ressources mobilisables a une durée sur trois ans en devises et dinars.» La marge suppose donc «un processus de maximisation des économies sur les ressources existantes pour ne pas arriver en 2019 avec des niveaux très faibles». Autrement dit, les efforts d'économie des stocks existants doivent s'accompagner par la recherche de substituts de ressources sans quoi l'Algérie fera à la fin de 2019 un plongeon de 20 ans en arrière.