Les députés du FLN et du RND ont voté, hier, le très contesté projet de loi relatif à la réforme de la retraite, avec un amendement transitoire permettant aux travailleurs ayant accompli 32 ans de service et de cotisations de partir en retraite à condition d'être âgé de 58 ans en 2017 et de 59 ans en 2018. Comme avancé dans notre précédente édition, les pouvoirs publics ont fini par céder face à la pression de l'intersyndicale autonome. Mais l'amendement oral proposé hier en séance plénière de l'APN par le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale «sur instruction du président de la République, Abdelaziz Bouteflika» est loin de convaincre. «Sans porter atteinte aux dispositions de cette loi, et pendant une période de deux années, il est possible d'accorder une pension de retraite avec application immédiate au travailleur justifiant 32 ans de service avec cotisation à la sécurité sociale, et ayant atteint ou dépassé l'âge minimum de 58 ans en 2017 et 59 ans en 2018», stipule le nouvel article introduit, selon Mohamed El Ghazi. Le représentant du gouvernement a expliqué que l'amendement vient dans le cadre «du suivi et de l'intérêt que porte le président à la classe ouvrière et ses revendications». Ce n'est donc pas le dispositif de retraite sans condition d'âge qui est entièrement maintenu, puisqu'il ne concernera que les travailleurs âgés de 58 ans minimum en 2017 et de 59 ans en 2018. Passée cette période transitoire de deux ans, la nouvelle loi modifiée entrera en vigueur à partir du 1er janvier 2019. Comme lors du mouvement de protestation de l'intersyndicale, les députés de l'opposition se sont rangés du côté des travailleurs. Les élus du PT et de l'AAV ont voté contre le projet et l'amendement du chef de l'Etat, au moment où ceux du FFS ont carrément boycotté la séance. Les espoirs de voir la retraite proportionnelle maintenue en tant que telle se sont finalement évaporés. Pour Ramdane Taâzibt, député du Parti des travailleurs (PT), «il est regrettable que l'appel de millions de travailleurs ne soit pas entendu par l'APN, après le gouvernement, malgré les grèves, les manifestations». «Nous prenons acte du fait que le président de la République ait essayé d'atténuer des conséquences de ce projet. Mais il s'agit d'un geste qui n'enlève en rien au caractère ‘anti-travailleur' de la loi. La retraite sans condition d'âge est de fait abrogée, donc le problème reste entier», nous a-t-il déclaré à la fin des travaux. «Le comble, ajoute M. Taâzibt, est qu'un député peut prendre sa retraite après 5 ans de travail, à l'âge de 30 ans et avec 75 000 DA de pension». «Une injustice», dénonce-t-il. De son côté, Youcef Khababa de l'Alliance de l'Algérie verte (AAV) a estimé que «l'amendement introduit à la loi n'est qu'un procédé arbitraire et autoritaire sans aucun sens. C'est un leurre qui va créer la zizanie au sein des syndicats, puisque la tranche de travailleurs qui peuvent en bénéficier est insignifiante. De plus, il ne va rien régler aux problèmes de la CNR et de ses déséquilibres financiers dont le ministre n'a donné jusqu'à présent aucun détail valable concernant les raisons», a déclaré M. Khababa. Le groupe parlementaire du FFS qui a boycotté la séance, rejetant «un projet injuste», a expliqué dans une déclaration que «la décision de reporter de deux ans l'application de la loi prise sous la pression du combat des syndicats autonomes, des travailleurs et des vrais députés ne change rien à son contenu». Reste enfin à attendre la suite que donnera l'intersyndicale à son mouvement après ce vote. Mais il est d'ores et déjà clair que l'amendement de Bouteflika ne change en rien à sa détermination. Ce que prévoit la nouvelle disposition L'amendement en question introduit une période transitoire de deux années accordant le droit de bénéficier de la pension de retraite au profit des travailleurs âgés de 58 ans et plus en 2017 et de 59 ans en 2018 et ayant totalisé au moins 32 années de service effectif. Lors d'une audience plénière présidée par Mohamed Larbi Ould Khelifa, président de l'APN, M. El Ghazi a présenté un amendement oral qui prévoit notamment que «sans préjudice des dispositions de la loi, il est possible, d'attribuer pendant deux années la pension de retraite, avec jouissance immédiate au profit des travailleurs salariés, âgés de 58 ans en 2017 et 59 ans en 2018 et qui ont totalisé 32 années au moins de service effectif ayant donné lieu au versement de cotisations». Le droit à la pension de retraite est concédé, dans ces cas précis, à «la demande exclusive du travailleur salarié». Le ministre a ajouté que «cet amendement intervenait sur instruction du président Bouteflika dans le cadre de son suivi et de l'intérêt permanent qu'il accorde aux attentes de la classe ouvrière, toutes catégories confondues, de notre pays afin de prendre en charge ses préoccupations, notamment ce qui a trait au droit de bénéficier de la pension de retraite sans préjudice des équilibres financiers de la caisse de retraite».