La capitale éthiopienne s'apprête à accueillir, demain, le 28e Sommet des chefs d'état de l'Union africaine. Outre les dossiers économique et sécuritaire inscrits à l'ordre du jour, le rendez-vous d'Addis Abeba verra l'examen de la demande de «ré-adhésion» du Maroc à l'Organisation panafricaine. Le royaume chérifien, qui avait remis le 22 septembre sa demande officielle à la présidente de la Commission de l'Union africaine (UA), semble avoir changé de fusil d'épaule, 33 ans après son retrait volontaire de l'OUA, pour protester contre l'admission, au sein de cette institution, de la République arabe sahraouie démocratique. La politique de la chaise vide jusque-là adoptée par le Makhzen s'étant avérée non payante, ce dernier – machiavélique à souhait – compte changer de stratégie pour mieux manœuvrer. Quitte à faire imploser l'UA. En effet, l'acceptation par Rabat de signer l'acte constitutif de l'UA, consacrant le statut de membre à part entière de la Rasd, constitue, aux yeux des observateurs, un revirement important. Cependant, ils s'interrogent sur les visées de ce genre d'acte qui ne reflète pas la ligne de conduite du Maroc à l'égard de la question sahraouie. Rabat étant allé jusqu'à renier toutes les résolutions consacrant le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination, à commencer par les accords de Houston, conclus avec le Front Polisario en septembre 1997. L'attitude du Maroc lors du Sommet arabo-africain, tenu en novembre dernier à Malabo, en Guinée équatoriale, est on ne peut plus édifiante quant à ses intentions à l'égard de la présence de la Rasd dans tous les forums et institutions régionaux et internationaux. à l'appel du palais royal, huit pays ont boycotté ledit Sommet, en signe de protestation contre la présence du Front Polisario. Il s'agit de l'Arabie saoudite, des émirats arabes, du Bahreïn, du Qatar, d'Oman, de la Jordanie, du Yémen et de la Somalie. Ces huit pays réclament «le respect de la souveraineté des états et de leur unité territoriale». Un coup que le Maroc risquerait de rééditer en s'adonnant à un véritable travail de sape à l'intérieur même de l'Organisation panafricaine. Le roi Mohamed VI doit justement se rendre en personne dans la capitale éthiopienne pour défendre la demande d'adhésion de son pays à l'UA. Une organisation mue par des principes tangibles et qui est confortée par l'arrêt de la Cour de justice européenne. «Il est exclu de considérer que l'expression ‘territoire du royaume du Maroc'... englobe le Sahara occidental et, partant, que ces accords (agricoles signés entre le Maroc et l'UE en 2012, Ndlr) sont applicables à ce territoire», indique ledit arrêt. Par ailleurs, l'envoyé spécial de la présidente de la Commission de l'Union africaine, Nkosazana Dlamini-Zuma, à la conférence internationale de soutien au peuple sahraoui qui s'est tenue à Rome, a appelé le Conseil de sécurité à agir pour imposer le respect des droits de l'Homme dans la région. «L'UA demeure solidaire avec le peuple sahraoui et réaffirme avec force son droit à l'autodétermination», avait affirmé la présidente de la Commission de l'UA. C'est ce que cette dernière vient de confirmer en donnant une leçon de diplomatie au chef de la diplomatie marocaine.