«On ne pouvait pas imaginer voir un jour des affiches du FLN écrites en tifinagh», lançait Saïd Sadi, un des acteurs du Printemps berbère du 20 avril 1980. Qui aurait imaginé, il y a 37 ans, au moment où tamazight était réprimée et opprimée, que la cause berbère ferait un jour le consensus au sein de la classe politique nationale ? Pourtant, aujourd'hui, c'est une vérité palpable. La majorité des partis politiques se réclame de cette cause et revendique sa promotion. Ce jeudi 20 avril, le printemps berbère et l'identité amazigh étaient au cœur de la campagne électorale pour les législatives du 4 mai prochain. Les chefs des partis engagés dans la bataille ont «célébré» dans les quatre coins du pays l'anniversaire de cette date phare de la lutte identitaire. Du patron du FLN, Djamel Ould Abbès, à celui du RND, Ahmed Ouyahia, en passant par la SG du PT, Louisa Hanoune et le président du MPA, Amara Benyounès, ils ont tous trouvé en ce 20 avril une opportunité pour s'inscrire dans cette reconquête de l'identité nationale reniée depuis des siècles. Ainsi, la secrétaire générale du PT, Louisa Hanoune, s'est engagée, lors d'un meeting populaire à Boumerdès, à œuvrer à l'institution d'un secrétariat d'Etat chargé «exclusivement» de la promotion de tamazight et de la question amazigh dans le pays. Elle a promis de veiller à la promotion de ce «composant essentiel de l'identité nationale» par l'affectation d'un budget «important» pour ce portefeuille ministériel, destiné notamment à la formation d'enseignants et de traducteurs susceptibles de généraliser l'usage de cette langue à tous les services administratifs, la justice et d'autres secteurs. Mme Hanoune plaide également pour que le premier jour de l'An amazigh, soit le 12 janvier, devienne «journée fériée et payée pour tous les Algériens». Pour sa part, le chef du MPA, Amara Benyounès, qui était cadre du RCD lorsque celui-ci se battait pour la reconnaissance de tamazight, a estimé qu'«après la démocratie calme, il fallait parvenir en Algérie à une paix linguistique car l'arabe et tamazight sont désormais deux langues nationales officielles». «La langue tamazight a besoin d'un travail approprié de la part des experts, des spécialistes et des linguistes pour lui donner tous les moyens de devenir effectivement une langue nationale et officielle», a-t-il lancé lors d'un meeting à Batna. Quant au RCD, il a choisi son bastion pour célébrer l'évènement. Le président du parti, Mohcine Belabbas, a participé à une marche organisée par le parti à Béjaïa. Il a animé également un meeting où il est revenu sur le printemps berbère. Depuis Sétif où il a animé un meeting populaire, le patron de l'ex-parti unique, Djamel Ould Abbès, est revenu sur les constantes nationales, affirmant que «l'unité du peuple algérien et du territoire national est sacrée pour sa formation politique». De son côté, le président du Parti de la liberté et de la justice (PLJ), Mohamed Saïd, a mis l'accent à El Tarf sur l'importance de renforcer l'unité nationale et de préserver les composantes identitaires nationales pour «se prémunir contre toute tentative visant l'Algérie». Il a aussi insisté sur l'importance d'accorder un «intérêt particulier à l'Histoire du pays et à la préservation de la mémoire collective». Ainsi, 37 ans après le printemps berbère, la défense de la cause identitaire n'est plus un tabou, ni limitée à une seule région, encore moins à un seul parti politique.