«Que cessent donc les hostilités ! Le tribunal a autre chose à faire que de vous écouter indéfiniment vous plaindre avec haine et passion», avait lâché la juge, muette d'abord comme une carpe. Ils ne voudront plus se taire une fois autorisés à se défendre devant le tribunal. Ce procès met en cause deux voisins qui n'en finissent pas de comparaître devant le tribunal correctionnel de Sidi M'hamed (Alger). Khadidja Khouaouana, la présidente du lundi, avait à cœur de savoir une bonne fois pour toutes si les hostilités allaient enfin cesser et laisser la justice aller au-devant d'affaires plus solides et plus sérieuses pour la bonne marche de la société en cette fin juin 2009. «Madame la présidente, je suis un père de famille qui aspire à vivre harmonieusement avec tous ses voisins mais ce jeune n'arrive visiblement pas à rester tranquille et à me laisser vivre en paix», se plaint la victime, et le jeune inculpé d'éclater : «Non madame la présidente, c'est certes un bon voisin mais qui est hanté par le bruit des fêtes, le klaxon, les rixes, et ne veut pas comprendre que dans une société, il y a une fin à tout.» La juge fait les gros yeux. «Et si dans tout ce que vous venez de dire, quelque chose dérange ce monsieur ?», lance-t-elle. Nordine Sayeh, le représentant du ministère public, invite alors la victime à reprendre les mots qui l'ont blessée. «Attention, il faudra les reprendre in texto devant le tribunal, car un arrêt de la cour suprême oblige les plaignants à répéter mot pour mot les insultes proférées, même les plus orduriers», reprend la juge qui devra faire preuve de patience, car la victime refuse de se plier aux recommandations de l'arrêt de la cour suprême - «J'attends ce que vous a dit l'inculpé ?», dit pour la dernière fois la présidente qui s'en remet au silence de la victime. Sayeh requiert une peine de prison de trois mois ferme. Auparavant, la victime n'avait pas demandé de dommages et intérêts : «Je voudrais seulement la paix et le respect.» En dernier ressort, l'inculpé avait droit au traditionnel dernier mot : «Je ne l'ai pas insulté. Jamais, ni cette fois ni les autres.» Khouaouana décide la mise en examen du dossier, histoire de ne pas se précipiter.