Le directeur général de la Banque extérieure d'Algérie (BEA) a tenu un discours très rassurant en ce qui concerne l'adoption du crédit documentaire comme seul moyen de payement dans le commerce extérieur. S'exprimant hier lors de la première rencontre tenue avant-hier soir au cercle militaire de l'Armée, en la présence des cadres de cette banque et les opérateurs clients de la BEA S'exprimant dimanche lors de la première rencontre tenue avant-hier soir au cercle militaire de l'Armée, en la présence des cadres de cette banque et les opérateurs clients de la BEA de la région Centre, Mohamed Loukal est revenu sur les différents avantages qu'offre ce moyen de payement avec comme principal argument d'assurer la sécurité et la traçabilité de toutes les opérations d'importation via les institutions financières. «Le crédit documentaire ne doit pas susciter l'inquiétude des opérateurs dans la mesure où il offre un certain nombre d'avantages à l'importateur qui lui permettent de mieux négocier son opération sur plusieurs aspects», a-t-il indiqué dans son allocution devant les clients. «Le crédoc est un mécanisme qui peut répondre à la clientèle notamment ceux qui sont versés dans la production. C'est une technique bancaire très normale qui assure la sécurité et la traçabilité», a-t-il précisé. Le PDG a indiqué que même la PME peut profiter de ce moyen de financement de la matière première importée, puisque la banque lui accorde une grande importance. «Nous avons doublé le financement en faveur des PME en passant de 109 milliards à 221 milliards de dinars», a-t-il souligné, répondant à l'une des préoccupations principales des clients qui estiment que ce moyen de payement exige d'avoir un bon approvisionnement de la lettre de crédit. Ce qui suppose un payement avant la réception de la marchandise avec des conditions relatives à la «bancabilité» de l'opérateur, M. Loukal a promis que des allégements seront apportés en fonction des discussions qu'aura la banque avec son client. «Cela dépend de la nature du client, il y a une catégorie de nos clients à qui nous pouvons ouvrir une lettre de crédit sans qu'ils aient aucun approvisionnement jusqu'à la réception de la marchandise et d'autres à qui nous allons approvisionner une partie, etc.», a-t-il précisé. Une garantie de payement Le PDG a affirmé que «la banque, à travers le crédoc, prend d'engagement de payer le fournisseur à la place de l'importateur en cas d'absence d'approvisionnement, et ce, jusqu'à l'ouverture de la lettre de crédit». «Le crédoc offre une garantie de payement aux fournisseurs, ce qui permet à l'opérateur de négocier la qualité de la marchandise, son prix et même la quantité», a-t-il expliqué. Pour parer à divers blocages qui puissent parvenir de la part du fournisseur, la BEA peut solliciter un correspondant pour le financement de la lettre de crédit en cas où le fournisseur refuserait de le faire. Ceci est possible dans la mesure où le crédoc est un moyen de payement international et permet des transactions entre les banques des opérateurs et des fournisseurs à travers «le transfert». Concernant la lenteur dans l'ouverture de la lettre de crédit documentaire au niveau des banques, M. Loukal a affirmé que le délai fixé par sa banque pour l'ouverture d'une lettre de crédit ne dépasse pas 7 jours. Lors de son intervention, Mme Guemache, cadre financier à la BEA, a mis en exergue l'importance de ce moyen de payement qui a «une valeur commerciale internationale». Elle a expliqué que beaucoup d'entreprises ont recours à ce moyen de payement auprès de la BEA et dont la valeur a atteint 4 milliards de dinars. D'autres allégements sont prévus Elle a estimé que les appréhensions soulevées par les opérateurs nationaux à l'instauration du crédoc sont justifiées par trois principale raisons, à savoir le caractère rigide et formaliste excessif du crédoc, les délais jugés longs et l'impact sur la trésorerie du client. Répondant à ces craintes, Mme Guemache avoue que le crédoc nécessite beaucoup de formalités mais qui profite à l'importateur. «Je pense que c'est le fournisseur qui doit se plaindre du crédoc et non l'importateur, dans la mesure où ce moyen de payement profite à ce dernier. Le crédoc ne peut se réaliser qu'après une analyse de la procédure et de toute l'opération en termes de conformité des documents fournis et de toutes les autres conditions. Le crédoc peut être gelé au moindre doute et à la moindre irrégularité constatée», a-t-elle expliqué. Elle précise que l'ouverture de la lettre de crédit se fait en moins de sept jours, parfois même à zéro jour. Elle souligne que la banque va mettre en place une organisation qui apportera satisfaction aux clients et a appelé ces derniers à construire des textes documentaires logiques et cohérents pour éviter la perte de temps. La même responsable a promis aux clients qu'il va y avoir des allégements pour l'approvisionnement, à condition qu'ils ne nuisent ni à la banque ni au client. Les opérateurs toujours sceptiques Les assurances tenues par les cadres de la BEA n'ont pas été suffisantes pour la centaine d'opérateurs présents à cette rencontre. Certains ont estimé qu'un seul mécanisme de payement reste insuffisant pour tous les opérateurs. Ils préconisent la diversité pour que chaque entreprise puisse agir selon ses moyens et ses méthodes de travail. «Nous avons acquis des habitudes depuis que nous sommes actifs. Nous avons entretenu des relations avec les fournisseurs avec lesquels nous travaillons d'une façon sereine. Il est difficile pour nous de changer du jour au lendemain», nous dira un opérateur. L'unification du moyen de payement du commerce extérieur est sérieusement pénalisante pour d'autres. «Il faut mettre en place tous les moyens de payement, comme ça c'est à l'opérateur de choisir le moyen qui s'adapte le mieux à ses besoins», nous a indiqué un autre. Certains ont relevé des contradictions dans l'application du crédoc et des zones d'ombre qu'ils n'arrivent toujours pas à comprendre. «C'est la première fois que je vois appliquer une mesure qui met à l'aise le fournisseur et met en difficulté les opérateurs nationaux», nous dira un autre. «C'est une méthode qui ne profite qu'aux banques. On va mettre notre argent à la banque et attendre un bon moment sans que ni l'opérateur ni son fournisseur ne soient payés. Au bout d'une semaine, le fournisseur est payé et l'opérateur n'a toujours pas sa marchandise à portée de main», s'est plaint un importateur. «Nous avons souffert pendant dix ans pour nous faire des relations et être approvisionnés dans de bonnes conditions, maintenant on vient et on chamboule tout», a-t-il ajouté. Il propose le retour à l'ancien système. «S'il y a des fraudeurs, c'est à l'Etat de les combattre avec les services concernés sans pénaliser les autres opérateurs», a-t-il ajouté. Un opérateur citera d'autres inconvénients. «Le fournisseur vous donne un crédit de 90 jours sans aucun bénéfice, contrairement à la banque où il faut payer pour avoir sa marchandise», a-t-il précisé. Il propose de renforcer les aides attribuées aux opérateurs. «Il faut diminuer les charges et les taux d'intérêt au niveau des banques pour faciliter le travail de l'opérateur», a-t-il suggéré.