A l'appel du muezzin marquant la fin d'une rude journée de jeûne s'ensuit naturellement tout un tapage crépusculaire fait d'entrechoquement d'ustensiles de cuisine, d'assiettes et de cuillères trop prisés à cette heure-ci, de bruissements de chérubins et de voix d'adultes qui semblent recouvrer désormais leur ton réconciliant à cet instant là. Pas plus d'une demi-heure plus tard, on entend cette fois-ci une voix féminine qui semble hurler de toutes ces forces dans la cage d'escaliers. «Fais vite sinon tu ne vas tomber sur aucun PC libre», crie la voix en question. Renseignement pris, il s'avère que c'est la fille du voisin d'en bas qui s'adressait à sa sœur cadette à qui elle reprochait une certaine lenteur dans sa démarche. Les deux frangines ont effet pour habitude de se rendre dès les premiers instants suivant le f'tour au cybercafé situé à 300 m environ de leur lieu de résidence. C'est ici qu'elles passent l'essentiel de leurs veillées de Ramadhan, où elles passent des heures à discuter en ligne avec leur frère vivant dans une capitale européenne. Souvent ces des fillettes arrivent un peu en retard et trouvent le cyber déjà bondé de monde. Elles sont ainsi contraintes d'attendre longtemps, souvent plus d'une heure, pour qu'un PC se libère enfin. A vrai dire les cybercafés ne désemplissent pas tout au long du mois de Ramadhan. Deux heure à peine après la rupture du jeûne et c'est la ruée des centaines de personnes des deux sexes, jeunes et moins jeunes. Tout ce beau monde prend d'assaut les cybercafés disséminés dans la capitale pour n'en ressortir qu'à une heure très avancée de la nuit. «Il m'arrive souvent de fermer boutique à quelques minutes seulement de l'imsak, soit vers 4h du matin», nous dit un gérant d'un cybercafé à Alger-Centre. Ce dernier parle de l'affluence record qu'enregistre son magasin juste après le f'tour et jusqu'à une heure tardive de la nuit. On y trouve des adolescents et des adolescentes, comme dans ce cybercafé à Beni Messous. Le gérant de cette boutique nous dit que «leurs pères pour se rendre aux tarawih les laissent là pour se divertir». En ces veillées de Ramadhan, les espaces internet sont au complet chaque soir. Le manque criant d'animation culturelle et artistique qu'il est difficile de combler dans la région algéroise favorise grandement ce choix porté sur les cybercafés qui sont devenus des endroits privilégiés pour de nombreux citoyens.