L'acquisition d'un logement restera en Algérie un rêve inaccessible pour la majorité des salariés, y compris pour les cadres de haut niveau. «Même un crédit immobilier bonifié ne permettra pas aux postulants d'en bénéficier puisqu'ils resteront aux yeux des banques non solvables». C'est le constat dressé par des représentants de banques et de promotion immobilière, lors de la rencontre organisée hier au forum d'El Moudjahid. Les salaires actuels sont en inadéquation avec les prix trop élevés des logements y compris pour le promotionnel. «Il faut travailler pendant 75 ans sans toucher son salaire pour pouvoir payer son logement», a révélé M. Boudaoud, président du collège des architectes. Les représentants du ministère lors de cette rencontre ont axé leurs interventions sur l'arsenal juridique existant pour ce qui concerne le logement. En dépit du système d'aide publique prévu pour le logement à caractère social, les promoteurs immobiliers bénéficient des avantages fiscaux tels que l'exonération de l'IRG et des avantages parafiscaux en plus des abattements sur les assiettes foncières. Aucun avantage pour les promoteurs privés Les promoteurs immobiliers privés ont affirmé ne bénéficier d'aucune exonération. Selon le promoteur M. Sahraoui, «les privés ne bénéficient d'aucune exonération». Pis encore, ils éprouvent des difficultés pour accéder au foncier qu'ils payent cher. Contrairement aux promoteurs immobiliers qui réalisent des logements pour le compte de l'Etat qui bénéficient d'un abattement de 80% sur le prix du foncier, ceux du secteur privé éprouvent beaucoup de difficultés pour accéder au foncier, a-t-il dénoncé. De son coté, M. Yahiaoui, promoteur et membre de l'Union générale des entrepreneurs algériens (UGEA) a dénoncé les pratiques bureaucratiques de l'administration qui occasionnent des retards aux promoteurs, ce qui les prive de l'exonération de l'IRG puisque le respect des délais est exigé pour pouvoir en bénéficier. Aucune étude des prix n'est encore réalisée Parallèlement aux jérémiades des promoteurs immobiliers, M. Boudaoud a reproché aux opérateurs de ne jamais avoir élaboré «une stratégie relative au logement», ni avoir élaboré une étude sur les prix. Intervenant dans le même contexte, M. Metref, responsable au Crédit populaire d'Algérie (CPA), a parlé du coût du mètre carré bâti. Ce dernier est équivalent, en moyenne, à 10 fois le SNMG (12 000 DA). Ce qui signifie, selon ce responsable, que la majorité des demandeurs de crédit «ne sont pas solvables». Même si les banques peuvent accorder des crédits jusqu'à 80% du coût du logement, un nombre élevé de clients n'a pas la capacité de rembourser, malgré le prolongement des délais de remboursement jusqu'à 25 ans et l'aide de l'Etat qui est de 700 000 DA. Le logement promotionnel, qui ne représente que 5% de l'ensemble du marché, ne peut être acquis que par 3% de la population, capable de payer. «Les promoteurs privés n'ont pas réussi à prendre en charge la forte demande de logement», a-t-il remarqué. Pourquoi pas un soutien pour l'acquisition des anciennes bâtisses Résumant la situation, M. Kenouche, responsable à la Caisse nationale d'épargne et de prévoyance, a proposé aux pouvoirs publics de penser à d'autres mesures devant encourager l'acquisition du logement. Limité jusque-là à l'achat de logement neuf, le soutien de l'Etat devra être orienté vers l'acquisition des anciennes bâtisses. Il saisit l'occasion pour présenter le bilan de sa banque en termes de financement. Ainsi, la Cnep accorde des crédits pour les promoteurs immobiliers d'un montant total variant, annuellement, entre 15 et 20 milliards DA. Et de préciser que «90% des crédits alloués sont destinés aux promoteurs privés», au nombre de 13 000. La crise du ciment persistera Par ailleurs, les promoteurs ont soulevé la difficulté d'acquérir les matériaux de construction. La pénurie de ciment ne sera pas résolue, même avec la prochaine importation d'un million de tonnes. Outre les 12 millions de tonnes indispensables pour parachever les 1,175 million de constructions inachevées, le nouveau million de logements du programme quinquennal 2010-2014 nécessitera annuellement 12 millions de tonnes de ciment. Sans compter la demande pour réaliser les autres projets de barrages, de routes et d'infrastructures, la production actuelle de ciment qui est de 18 millions de tonnes ne suffira pas pour couvrir les besoins, ont-ils prévenu. Le promoteur Boudaoud craint, à cet effet, une accentuation de la hausse des prix des matériaux de construction qui a dépassé les limites ces derniers mois. Les correspondances adressées par les promoteurs aux ministères du Commerce et de l'Habitat sont restées lettre morte, a-t-il regretté.