Un beau gosse dont la joue gauche porte un «sillon» de huit centimètres. Il est poursuivi pour port d'armes prohibé. Et l'arme en question est «blanche», un sabre pour tout dire, car Kennas, le procureur, avait dit une arme blanche en montrant le bras et l'avant-bras pour convaincre Bedri, la juge, que ce n'était pas un... canif, comme avait voulu expliquer le détenu, un récidiviste en la matière. Ce grave délit tend à s'étendre même dans les établissements scolaires. Abdelhamid M., trente-sept ans, et dont le visage jovial fait beaucoup moins, a tout tenté pour éviter les dix-huit mois ferme réclamés entre les lèvres par ce sombre parquetier Youssef Menasra, jamais tendre avec les récidivistes. «Alors, inculpé, que faisait-on avec une aussi longue arme blanche dans la rue ?», demande avec beaucoup d'assurance Selma Bedri, la juge et fougueuse présidente de la section correctionnelle du tribunal d'El Harrach. Le détenu va lâcher des bribes de mots inaudibles, mais va tout de même faire un geste avec les deux mains comme pour démontrer que l'arme blanche trouvée sur lui n'était qu'un canif ! Et ici, Menasra va faire comme son collègue et ami, le procureur du mercredi, Messaoud Kennas. «L'arme blanche en question était de cette longueur», explique le représentant du ministère public avant de montrer tout le bras et l'avant-bras, soit la longueur d'un sabre. - «Que faisiez-vous avec ? Vous intimidiez vos victimes ? Vous coupiez des fruits ? Allez savoir avec ce genre d'individus !», s'exclame la magistrate qui va de suite prendre acte des demandes du représentant du parquet, écouter le traditionnel dernier mot de l'inculpé qui arrivera tout de même à demander pardon et décider sur le siège d'infliger une peine de prison ferme de six mois, avant de lui rappeler qu'il a huit jours pour interjeter appel. Mais non, le condamné préfère faire la bise sur ses phalanges, qui iront s'implanter sur son front en guise d'un «ouf» et d'une longue phrase : «Je l'ai échappé belle avec les dix-huit mois réclamés par le procureur.» Entre-temps, Bedri avait engagé un mini-dialogue avec maître Abdelkrim Djouahra qui avait probablement demandé un petit renvoi de son affaire de détention de stups !