D'habitude, nous vivons des interventions à l'audience de parents qui chahutent, supplient, demandent aux juges d'êtres indulgents. Certains vont parfois jusqu'à l'outrage lorsqu'une lourde peine est donnée en guise de réponse du tribunal. C'est une maman qui est venue dans la salle d'audience demander à la présidente de renvoyer le procès juste pour que son rejeton se dessoûle et comparaisse dans un meilleur état. La juge a renvoyé l'endience non par plaisir mais... Le détenu est beau. Il le sera jusqu'à l'intervention de la maman venue très tôt à Hussein Dey avec la ferme résolution de punir cet ado de vingt-sept ans qui a osé humilier sa famille et donc sa mère pour s'être laissé embarquer dans le vaisseau de... Bacchus dans les environs de l'Apreval, ce quartier où normalement il fait bon vivre. Nous écrivions donc que la maman, tapie au milieu d'une dizaine de mamans, toutes épouses ou filles venues assister au procès des leurs, ne s'était nullement manifestée jusqu'au moment où Cherif, son fils, montra le bout du nez vigoureusement accompagné du policier chargé de l'ordre depuis les geôles du tribunal à la barre face à laquelle Nadia Amirouche, la présidente, se trouvait tant bien que mal en ce mois de juillet chaud et très humide. Le gaillard n'avait même pas eu le temps d'écouter ce qu'avait à dire la juge du siège qu'il allait se retourner avec une grimace qui lui fit perdre toute sa beauté. Et qu'est-ce dont ce qui le fit retourner ? Eh bien, ce fut la maman qui se leva soudain du banc, regagna l'allée et tonna d'une voix puissante et délivrée : «Madame la présidente s'il vous plaît renvoyez le procès pour lui apprendre à mieux se conduire.» Amirouche elle-même avait sursauté avant même le détenu qui n'avait pas du tout apprécié l'attitude de la maman qui avait été, entre-temps, prise en charge par le brigadier qui fit la sortir et de la salle d'audience et du tribunal, question d'autorité à ne jamais bafouer de la sorte. Pendant ce temps, l'inculpé d'état d'ivresse manifeste et trouble à l'ordre public devra effectivement rejoindre les «Quatre ha» car les débats ont été renvoyés par la magistrate, non pas à la demande de la mère du détenu, mais le temps de recevoir le casier pour que justice soit rendue dans les normes, celles que Nadia Amirouche adore respecter juste pour qu'elle soit respectée tout autant que la justice qu'elle sert parfois au détriment de sa propre petite famille. C'est pourquoi la présidente qui voulait lire le casier de l'inculpé a dû comprendre à une seconde près le cri de désespoir de la maman qui a voulu que son fils reste encore un peu en taule avant d'être entendu à la barre.