Il y a des jours porte-bonheur, comme les nombres à deux chiffres..., mais l'association de malfaiteurs porte son nom ! Un détenu a un casier si chargé que la juge s'est passée de le lire à l'assistance très nombreuse. Derbouchi-Makhloufi Saloua, la présidente du pénal du samedi, invite prestement l'inculpé principal à aller de suite droit aux faits. «Alors que s'est-il passé le 21 du mois ?» demande, la mine délivrée du stress de la noire journée du mercredi printanier, la juge à Abderrezak Z., un récidiviste en matière de vols multiples et un casier à plusieurs «tomes». Les trois détenus évitent de se regarder. Depuis qu'ils ont été interpellés, ils nient. Ils nient tout et si bien que pour – certainement – émouvoir la justice, ils se sont passés de défenseurs. Ici, ils sont libres de se comporter ainsi sauf qu'en face, il y a une procureure venue prendre la température et «prescrire l'ordonnance». La vie ignominieuse de Abderrazak, un homme de peine enrichi et fragile, jusqu'à être poussé à l'association de malfaiteurs, a soudainement basculé. Les acolytes de Abderrazak furent amenés à la barre par une faute plus ancienne. Ils étaient lucides devant le mal mais impuissants devant son rejet difficile à effectuer vu l'ampleur du mal précisément. Le silence de Abderrazak et ses rétractations nous introduisent superbement dans l'obscurité totale où brille, pourtant, innocente et riante, l'amertume doucement salée et étalée à la barre. C'est fin, intelligent. Deux portraits dessinés d'un trait fin et alerté, par le procureur, sarcastique comme son sourire légendaire et son mépris pour les lâches. Un presque simple d'esprit que cet inculpé, témoin dont on apprécie la singularité pourtant inquiétante. Il nie mais en se mettant en colère avec un sec : «Je suis innocent. Je n'étais pas avec les deux autres.» A la barre, le détenu est mieux qu'au box. Il s'étale alors dans des «entre parenthèses» intelligentes dites dans un français correct et souvent pleines d'humour, cassant la solennité et l'austérité de l'ambiance propre aux salles d'audiences, une ambiance sinistre, soulignons-le. Presque ébahie et plutôt charmée, la présidente reste cependant concentrée et vigilante. Il faut dire qu'auparavant elle avait lancé en guise d'échauffement. «Alors, inculpé, vous donnez rendez-vous au café du coin et vous discutez d'une affaire juteuse : visiter un appartement déserté en cette belle période de vacances de printemps, vous servir à gogo et vous évanouir dans la nature. Et encore, vous ne pouviez pas le faire car un voisin connaissait Salim. N'est-ce pas Abderrazak ? Et vous Mahfoud ? Qu'avez-vous à dire ?» Mourad Hellal, le procureur, va intervenir en prenant comme arme de destruction du délit les termes de l'article 350. Le vol ! Un redoutable article qui va voir l'inculpé retourner à Serkadji pour deux longues années fermes à moins que l'appel...