Si la plupart des écoles n'ont pas assuré de cours depuis dimanche pour cause de grève, certains établissements scolaires n'ont pas fermé leurs portes et ont accueilli les élèves le plus normalement du monde. C'est le cas de l'école primaire Saâdi 2 de Ben Aknoun où nous avons remarqué une ambiance de tous les jours, dans le sens où les élèves ont rejoint les salles accompagnés de leurs instituteurs. Abordée, la chef d'établissement nous a fait savoir que la raison revient «en quelque sorte» au fait que les enseignants sont en majorité des contractuels et que les deux seuls enseignants titulaires n'ont pas suivi le mouvement de grève. «Nous ne sommes pas concernés par la grève et tous mes enseignants, comme vous le voyez, ont rejoint leur poste», a-t-elle déclaré, ajoutant que son établissement n'est pas le seul à adopter ce principe. Effectivement, d'autres établissements n'ont pas suivi ce mouvement de protestation mais pour d'autres raisons cette fois-ci. Lors de notre virée au lycée El Mokrani 1, rien ne prêtait à une ambiance de grève au vu du calme qui régnait dans le préau ainsi qu'à l'entrée du lycée où aucun groupe de lycéens ne s'est formé, comme on a l'habitude de le voir dans des situations de contestation. Bien que les salles n'étaient pas au complet, la plupart des professeurs ont assuré leurs cours. L'intendante nous a affirmé que les élèves de terminale ont eu cours depuis le début de la grève bien que les professeurs soient avec les protestations. «Il s'agit de la conscience professionnelle car, à ce rythme, les professeurs n'auront jamais le temps de rattraper les heures perdues», a-t-elle expliqué, ajoutant que les enseignants ont également assuré jusque-là les cours de première et de seconde, ne serait-ce que jusqu'à 11h. Etablissement en grève en dépit de tout Au lycée de Dély Ibrahim, les enseignants, par contre, n'ont pas manqué d'afficher leur adhésion à la contestation en nous accueillant dans la cour de l'établissement, clamant des revendications, telles que l'augmentation des salaires, l'amélioration des conditions de travail et bien d'autres revendications déjà connues. «Il faut que l'enseignant en Algérie s'adapte au développement technologique. Chose irréalisable s'il reste lésé quant à l'amélioration de ses conditions socioprofessionnelles», explique un professeur de mathématiques qui ajoutera que la situation perdurera si leurs revendications ne sont pas prises en compte. A l'intérieur, le censeur a refusé de nous donner la moindre information. Il nous a conseillé de voir les syndicats concernés pour plus de détails vu que le ministère de l'Education nationale leur a formellement interdit de communiquer sans autorisation. A l'extérieur, les élèves attendent inlassablement la reprise des cours. Ils nous font savoir qu'ils se déplacent chaque matin pour être renvoyés un quart d'heure après. Les mêmes propos ont été exprimés par les élèves du CEM Mohamed Taher de Ben Aknoun, où tous les enseignants, à l'exception des contractuels, étaient en grève, selon une enseignante qui nous a donné «discrètement» cette information, nous précisant que ce mouvement de protestation durera jusqu'à jeudi. «Ce sont seulement les enseignants affiliés à l'UGTA et les contractuels qui ne sont pas en grève», ajoute-t-elle, précisant que tous les autres - ceux de l'Union nationale des professeurs et des enseignants du fondamental (Unpef) - protestent. Un instituteur de l'école Amara de Chéraga a abondé dans ce sens, développant qu'après une reprise des cours d'une semaine, une autre grève serait entamée éventuellement s'il n'y pas de dialogue. En attendant, les parents se plaignent mais compatissent Contactée, Mme Djamila Khiar, présidente de la Fédération des parents d'élèves, se dit outrée par la tournure des événements, exprimant son désarroi de voir des enfants et des adolescents perdre des jours de cours. «Ce sont nos enfants qui sont pénalisés face à cette situation et nous nous retrouvons en tant qu'association et en tant que parents d'élèves entre le marteau et l'enclume car les parents souffrent de voir leurs enfants renvoyés de l'école tout en comprenant le geste des enseignants, d'autant que nous ne sommes pas en mesure de régler cette situation, encore moins juger qui a tort ou qui a raison», a-t-elle déclaré, espérant que les autorités concernées et les syndicats trouvent un terrain d'entente et de dialogue. Il est même pressant de le faire, selon Mme Khiar, car le secteur de l'éducation ne cesse d'être perturbé, «et à ce rythme, nous revivrons ce qui s'est passé en 2003, lorsqu'on a été contraints de créer une deuxième session pour l'examen du baccalauréat», a-t-elle ajouté, estimant que la sagesse des enseignants et leur professionnalisme évacueront cette tension et mettront fin à ces turbulences dans le milieu scolaire. «Je souhaite également que l'Etat réponde favorablement aux enseignants, non seulement pour régler cette situation mais aussi parce que nos professeurs, il faut le dire, le méritent», a conclu Mme Khiar.