Certains magistrats voient pousser des boutons en plein cervelet lorsqu'ils ont sous les yeux ce délit «bête et embêtant» qu'est l'abus de confiance, fait prévu et puni par l'article 376 du code pénal. Et à Boufarik, les avocats s'y prennent à deux fois avant d'accepter de telles affaires difficiles à examiner et surtout à démêler l'écheveau surtout si, par malheur l'inculpé d'abus de confiance doublé d'un escroc et même triplé par la légende d'un inculpé roublard. Pourtant, ce dossier... Le détenu, client de maître Aït Boudjemaâ, était poursuivi pour abus de confiance, article 376 du code pénal. Boudemagh, la juge, l'a rappelé à l'inculpé qui avait à ses côtés la victime qui aurait prêté la caméra à l'inculpé qui a vite déclaré qu'il était prêt à payer l'engin à histoires. - «C'est une affaire d'un cupide qu'a été mon client», a lâché maître Abdennour Aït Boudjemaâ qui a l'art de dédramatiser des situations délicates que d'autres ont de la peine à aborder. Effectivement, la présidente de la section correctionnelle du tribunal de Boufarik (cour de Blida) sait à quoi s'en tenir lorsqu'elle a entre les mains un dossier enrobé d'abus de confiance, un délit facilement et aisément saisi lorsque les faits sont, à eux seuls, éloquents et où les preuves sont criardes. Seulement dans cette affaire, l'avocat du jour va tout entreprendre pour tirer la juge sur son terrain de prédilection : la persuasion «Dix-huit mois de prison ferme», réclame Djamila Benkhettou plaidant au milieu du bruit du chantier d'à côté. Maître Aït Boudjemaâ rappelle que la victime loue les caméras, les cassettes vidéo et gagne aussi sa vie. «Il y a eu un accord lors de la cession de l'appareil. Donc, il y a ici nécessité de déclarer l'incompétence. C'est une affaire civile, même si mon client a commis une erreur en ne restituant pas la caméra prêtée, à temps, ce qui a fait que la victime avait été prise de panique. Il est vrai que mon client a reconnu avoir emprunté l'appareil avec le souci de s'en débarrasser une fois la fête passée», a encore ajouté le défenseur que Boudmagh écoute avec beaucoup d'intérêt, d'attention et surtout de patience puisque le grand conseil avait réclamé l'indulgence avant de s'étaler sur le dossier. Il reviendra dix-huit secondes pour rire au nez des... dix-huit mois ferme de prison en arguant du seul fait qu'une telle demande ne peut avoir lieu puisque le délit n'existe nullement du côté pénal de la chose. La présidente sourit largement en direction du gus-inculpé qui a réclamé en guise de dernier mot la relaxe car «je ne suis ni un voleur, ni un escroc» avait-il plaidé avant que la magistrate ne lui inflige une peine de prison de six mois, assortie du sursis juste de quoi lui brandir l'épée de Damoclès afin que l'on ne l'y prenne plus, avec ces histoires d'emprunts ou de prêts.