En proposant au regard quelques étapes de l'évolution et surtout les transformations du mûrissement intérieur de leur auteur, les tableaux de Dahmane Azzoune mettent en valeur l'extraordinaire fantaisie d'un peintre véritablement possédé par ses créatures plastiques. L'analogie de la fragmentation de la toile et de la division des cellules n'est pas fortuite chez Azzoune. Il s'agit là de trouver un moyen d'exprimer un certain ordre de la vie qui représente pour l'artiste la véritable fonction de l'art. Couleurs vives, bleu, vert, rouge. Fait de hachures ou de traits complexes, filiformes et labyrinthiques. Les cinq doigts, le gestuel et la danse africaine en pop art. En ce sens, les tableaux de Azzoune évoquent des paysages imaginaires des partitions de couleurs, des «architectures fantastiques». Discrète, vibrante, chargée d'une mystérieuse énergie, la couleur «des lilas», des jaunes clairs, des mauves, des bleus liquides et parfois des roses, rehaussés de signe dont le sens se propose en déchiffrement et se dérobe en même temps. Mouvement plein de heurts, de repères, de doute…, bien que les toiles soient hachées, débridées, avec des zones d'action ou la tension est extrême et des plages d'hésitation ou d'errements. Cet artiste peintre avance dans une oie étrangement calme, étrangement blanche. Elle semble épouser le silence qui l'entoure comme le vol d'une mouette le vent au-dessus de la mer. Azzoune est diplômé de l'Ecole nationale des beaux-arts d'Alger. C'est à partir de 1966 qu'il commence à exposer dans différentes régions du pays et à l'étranger. A l'instar d'autres peintres de sa génération, Azzoune s'est penché sur la recherche de l'originalité dans les formes, les couleurs et le méthodes de composition artistique. Peintre de l'émotionnel où les couleurs du prisme s'éveillent Influencé au départ particulièrement par Picasso et Miro, c'est sans doute ce dernier, peintre, graveur et sculpteur espagnol, qui éveilla en lui une autre passion qui est celle de la sculpture. En tant que sculpteur, Azzoune a réalisé des œuvres, notamment pour le compte de la wilaya d'Alger. Ces fresques sont «bâties» à partir du polyester armé en tissu de verre. Il tisse un lien direct entre la peinture et la sculpture. Ses thèmes sont très divers, allant des paysages imaginaires aux portraits. Enfant telle une ombre, engagé à devenir un rayon de lumière, une colonne de feu ou femme trop nostalgique, captive dans son bel œil au labyrinthe bleu. Le peintre utilise un espace où les choses tremblent, se combinent et se dissocient… un monde de reflets. Peintre de l'émotionnel où les couleurs du prisme s'éveillent, s'effacent, renaissent et se prolongent parfois en traînées épaisses. Cette figuration prend progressivement les rutilances du fauvisme, parfois s'en va dans le style pop art. Un monde des formes et de couleurs pures qui donnent une ambiance fulgurante aux toiles. La sculpture et la peinture ont toujours suivi pas à pas les sursauts et les éclipses des époques. Pour cet artiste, la fresque est faite pour fixer l'instant passionnel dans une matière solide, comme la méditation. Les sculpteurs comme les peintres de Azzoune constituent des îlots de rêve au souffle africain.