«L'Algérie est indépendante. Réveillez-vous, elle n'est plus une annexe de la douce France». C'est ainsi que Kheiredine Boukherissa, président de la fondation 8 Mai 1945, a écrit dans sa réponse aux déclarations scandaleuses du ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner. Dans un entretien accordé à l'hebdomadaire Le journal du dimanche, Bernard Kouchner a estimé que «les relations entre la France et l'Algérie seront plus simple lorsque la génération de l'indépendance algérienne ne sera plus au pouvoir». Cette déclaration a suscité une vive réaction de la fondation 8 Mai 1945 qui a indiqué que les propos de Bernard Kouchner n'honorent ni la France, ni son peuple, ni même les principes fondateurs du socialisme dont il est tributaire. Dans un communiqué rendu public signé de son président, la fondation écrit notamment : «Votre refrain est connu, les temps ont changé et l'Algérie aussi. Il n'y a que vous et ceux qui vous manipulent qui somnolent encore dans les vieilles chansonnettes des nostalgiques d'hier et d'aujourd'hui…» M. Boukherissa a tenu à rappeler au ministre français que l'Algérie ne compte pas reculer sur ses revendications relatives à la demande d'excuses officielles et à l'indemnisation des victimes des crimes commis durant la guerre de Libération nationale. Pour lui, cette position n'a pas changé, et la criminalisation de colonialisme est une question d'actualité qui se pose avec insistance. «L'Algérie est souveraine et ses politiques le sont également. Elle a toute la latitude et le droit de demander réparation sur tout ce que la France coloniale a fait subir à notre peuple durant 132 ans. Et elle n'a pas l'intention de faire marche arrière. La résistance continue et elle continuera bon gré mal gré, jusqu'à la réparation», a-t-il précisé. Revenant sur l'initiative de parlementaires algériens qui ont proposé un projet de loi incriminant le colonialisme, le président de la fondation 8 Mai 1945 dira que cette démarche émane du peuple également. «Nos hommes politiques sont élus par le peuple et ils expriment nos revendications, nonobstant ceux qui ont rompu à vos hégémonies», dira-t-il encore. A titre de rappel, le rédacteur du communiqué a ajouté : «La génération qui défend la mémoire de ses pères et aïeux est celle dont les familles ont subi vos atrocités. C'est une jeune génération qui ne tarit pas de ressources ; elle est encore plus acharnée que celle qui dénonce vos sarcasmes et vos inconvenances, particulièrement sur cette question. Nous sommes les dignes héritiers de nos glorieux combattants de Novembre et autres dates historiques depuis l'Emir Abdelkader jusqu'à Larbi Ben M'hidi, Amirouche, Ben Boulaïd, Didouche, Boudiaf et bien d'autres valeureux patriotes.» M. Boukherissa relève les sentiments d'acharnement et de haine qui alimentent le discours de Kouchner contre les Algériens. «Le chauvinisme exacerbé dont il fait preuve est dans sa propre nature ; il apparaît inconsciemment comme une fièvre indépendante de sa volonté. Cette phobie, il la développe depuis des lustres contre les purs et durs Algériens.» Le président de la fondation revient sur le parcours du ministre des Affaires étrangères français qui, note-t-il, «n'a pas hésité à tourner sa veste pour un poste de responsabilité médiocre. Ce partisan du droit d'ingérence, ce faux socialiste, exclu de son parti, qui prétend être un fervent défenseur des droits de l'homme alors qu'il avale toutes les couleuvres qu'Israël lui ingurgite pour s'opposer aux droits des Palestiniens et des autres peuple spoliés d'Afrique et d'ailleurs. Un homme qui n'a aucune ligne directrice dans sa politique à géométrie variable. Un piètre apprenti diplomatique», a encore ajouté le communiqué. Les déclarations de Bernard Kouchner, faut-il le souligner, interviennent dans une phase marquée par une grande tension marquant les relations entre l'Algérie et la France. Ces déclarations ne font que compliquer davantage ces relations qui sombrent dans une crise sans précédent.