La menace brandie par le ministre de l'Education nationale à l'égard des enseignants ne semble pas avoir eu l'effet escompté puisque, de l'avis du secrétaire général du Conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Cnapest) : «Les enseignants n'accepteront jamais de reprendre le travail sous la menace». Réagissant à la déclaration de Boubekeur Benbouzid qui menaçait, lors d'une conférence nationale des directeurs de l'éducation des wilayas, de radier les enseignants en grève et de procéder, au nom du gouvernement, à la dissolution définitive des syndicats, Lârbi Nouar, SG du Cnapest, a dénoncé cette sortie médiatique. Il a estimé que le ministère veut des syndicats figurants qui «ne jouent aucun rôle reconstructif du secteur, c'est-à-dire ne font aucune proposition ni de dénonciation de la mauvaise gestion du ministère». Et d'enchaîner : «Il veut (le ministère) des syndicats qui acceptent tout, et c'est ce qui explique la création de plusieurs clones, chargés de figurer comme des syndicats revendicatifs, mais en réalité ils travaillent pour casser notre mouvement de protestation.» Interrogé sur le risque d'aller vers la dissolution de leur syndicat si le mouvement de protestation est maintenu, Laârbi Nouar indique que leur organisation syndicale s'est imposée entre 2003-2007 et a réussi à avoir gain de cause, sans l'obtention d'agrément, ajoutant : «Nous sommes prêts à prendre le risque car nous détenons notre force de la base.»Selon le même intervenant, «le pouvoir discrétionnaire manque aux responsables de notre ministère car à chaque fois qu'il trace des objectifs, c'est le contraire qui arrive». Concernant l'éventualité de la radiation des enseignants qui n'auront pas repris leur travail après deux mises en demeure à compter d'hier, comme l'a bien précisé le ministre de l'Education, le SG du Cnapest considère que cette «arme utilisée contre les enseignants est contraire à la loi qui protège les grévistes contre toute radiation». Avec cette sortie médiatique, estime notre interlocuteur, «c'est le droit à la grève qui est bafoué», ajoutant que «le ministère veut faire taire les enseignants craintifs et peureux». Et de conclure : «Les enseignants qui se sentent bafoués et touchés dans leur dignité par ces pratiques n'accepteront jamais de rentrer en classe sous la menace car ces derniers sont les descendants de personnes courageuses, comme les martyrs de la révolution Ben M'hidi, Mustapha Ben Boulaïd et leurs compagnons.» A cet effet, le Cnapest tiendra son conseil national extraordinaire aujourd'hui pour décider de la poursuite ou non de la grève. L'organisation syndicale revendique 65% d'adhérents parmi les 65 000 enseignants du secondaire. L'Unpef réagit : «La reconduction de la grève n'est pas à écarter» Joint par téléphone, Sadek Dziri, secrétaire général de l'Union nationale des professeurs de l'éducation et de la formation (Unpef), a réagit aux déclarations du ministre en dénonçant : «Nous regrettons la réaction du premier responsable de l'éducation nationale qui au lieu de s'atteler à prendre en charge les revendications de la corporation en suspens depuis des années, a saisi la justice pour mettre la pression sur les enseignants qui sont dans leur droit légitime», ajoutant : «C'est une atteinte à la liberté syndicale.»Il y a lieu de rappeler que l'Unpef a décidé avant-hier lors de son conseil national de mettre fin à sa grève entamée le 24 février. M. Dziri explique : «Nous avons décidé d'appliquer la décision de justice qui a déclaré la grève illégale.» L'Unpef a appelé donc les enseignants grévistes à reprendre les cours dès hier. Toutefois, M. Dziri affirme que la reprise de la grève n'est pas à écarter. Un conseil national sera incessamment convoqué afin d'étudier cette éventualité. Saisie par le ministère de l'Education nationale, la justice avait, pour rappel, prononcé le 1er mars en référé l'arrêt immédiat de la grève et la reprise des cours. Pour sa part, le ministère de l'Education nationale a appelé, mercredi 3 mars, les enseignants grévistes à reprendre le travail au plus tard dimanche, sous peine d'être sévèrement sanctionnés.