Le non-paiement de la pension alimentaire demeure un grave délit qui met les enfants dans une malheureuse situation. Oui, par la faute de ce délit, des enfants mendient. Ils ont faim. Et lorsque nous écrivons le verbe «mendier», c'est pour ne pas aller jusqu'au verbe «voler», donc aller vers un délit parce que l'on a été victime du délit de non-paiement de la pension alimentaire. Et lorsqu'un juge envoie en taule un père défaillant, il sait pourquoi il le fait. La pension alimentaire est une nécessité ! Quels que soient les motifs, rien ne pourra empêcher le père de venir en aide à ses enfants. L'affaire du jour a tourné autour d'une suspension du versement de la pension alimentaire jusqu'à ce que le dossier de fond soit examiné et achevé. C'est la quadrature du cercle. Tuant ! Abdelkader M. est ce père de famille qui se noie dans de gros bassins d'ennuis, aussi gros que les articles de loi qui le mettent dans une position inconfortable. Poursuivi pour non-paiement de la pension alimentaire, il a, à ses côtes, maître Mehdi Nouas, descendu de Koléa sur Saïd Hamdine pour tenter de sauver ce qui peut l'être. Face à Samira Kirat, la présidente de la section correctionnelle du tribunal de Bir Mourad Raïs (cour d'Alger), l'inculpé va de suite s'adresser à son ex-épouse. Ce qui est inconvenant à la barre. Toutes les parties doivent s'adresser au seul tribunal, les discussions de rue, de café, de fast-food : interdit. Et le juge y veille ? - «Vous deux, cessez immédiatement de vous faire des reproches à la barre. Ici, vous êtes pour répondre aux questions. Vous d'abord madame. Combien vous doit le père de vos enfants ?», demande avec prestance Kirat. - «Dix-sept millions de centimes pour les deux enfants, ce qui est nettement insuffisant, et lorsque je...», dit sans réfléchir Ouassila M. R., la maman qui est priée par la juge de ne pas aller au-delà des réponses. - «Je t'ai remis déjà sept millions. Il ne reste donc que dix millions», jette, sans l'autorisation du tribunal, Abdelkader qui ajoute qu'il vit une situation catastrophique, surtout depuis que la première épouse lui avait jeté dans les bras leurs deux enfants handicapés qui vivent le calvaire à la maison pour insuffisance de revenus. Et madame l'ex. de sauter au cou du père des enfants : «Crois-tu que les trois mille dinars suffisent ?» La juge tape du poing : «ça suffit vous deux ! Cessez d'importuner le tribunal. Ce n'est pas ici d'évaluer la pension alimentaire. Ici on évoque le non-paiement. L'essentiel, vous, inculpé est de ne plus tarder dans la régularisation de vos enfants toutes les fins de mois», ordonne la présidente qui va encore une fois entendre la maman réclamer «trois mille dinars par enfant». Maître Zohra Tahar, l'avocate de la victime, dédramatise tout en regrettant que le papa n'ait pas compris que trois mille dinars ne peuvent suffire pour faire vivre ses deux enfants. Elle refuse tout débat autour du montant de la pension alimentaire qui relève de la seule compétence de la justice. Enfin, elle réclame les dommages et intérêts et laisse Mourad Hellal, procureur, demander une année de prison ferme. Survolté mais pas fâché, le plus jeune des Nouas s'accroche désespérément à la suspension du versement de la pension alimentaire jusqu'à l'examen du dossier de fond. - «Il n'y a aucun délit. Abdelkader est un bon père de famille. Il ne fait qu'obéir à la loi et à sa conscience de père de famille dans la tourmente de mauvais quotidiens. Quant à la victime, il y a des voies à suivre pour l'augmentation de la pension alimentaire dont le montant reste du seul ressort du juge du statut personnel», a ajouté maître Nouas, qui a dit en outre à la juge de ne pas examiner la plainte qui est sans fondement. En disant ces paroles, il a remis des copies au procureur, à l'avocate de la victime et à Kirat qui annonce la mise en examen de cette affaire qu'elle n'aurait pas aimé avoir entre les mains.