Le ministère du Travail va «rendre hommage à certains de ses retraités» et aux «travailleurs de la carte Chifa» sans trop se soucier ce qui pourrait bien justifier cette sélection, en dehors, peut-être, de la coïncidence approximative du moment de leur départ avec la célébration du 1er Mai, toujours journée internationale du travail pour les premiers. Pour les seconds, c'est un peu plus compliqué tout de même. La carte Chifa, comme toutes les velléités bien intentionnées, aurait pu être quelque chose de formidablement utile. Pour avoir souffert de l'archaïsme et de l'obsolescence de l'ancien système de remboursement des décennies durant, les Algériens sont plutôt placés pour savoir que le moindre changement dans le rouage dans le sens de son amélioration est le bienvenu. Or, il ne suffit pas d'énoncer une formule en l'occurrence, d'en faire un exemple de pertinence de louer son efficacité, et maintenant «récompenser les travailleurs» qui y ont travaillé pour que la réussite soit au rendez-vous. A moins de vouloir à tout prix fêter un bide et promouvoir ceux qui y ont veillé, tout le monde vous le dira : il n'y a pas vraiment de quoi pavoiser. La procédure d'accès à ce service censé rendre la vie des assurés moins pénible est longue et compliquée, l'accompagnement technologique n'est pas venu, la majorité des pharmaciens n'en veulent pas pour des raisons plus ou moins avouables et l'usage, pour les rares chanceux qui l'ont déjà obtenu, est toujours problématique. S'il s'agissait, pour le ministère du Travail, de trouver quelque chose «à se mettre sous la dent» à l'occasion du premier mai, parce qu'il est quand même concerné par le… travail, on aurait compris, l'habitude aidant, qu'il «concocte» quelque cérémonie de circonstance qui ne remuerait pas le couteau dans la plaie. Mais qu'il songe à nous présenter des stakhanovistes de la performance là où n'a vu qu'une énième désillusion, il ne faut quand même pas exagérer ! Orphelin d'un dynamisme ouvrier dont on a décapité le tissu industriel et d'un mouvement syndical qui n'a plus de sol sous les pieds, le monde du travail est invité depuis des années à une fête du travail sans raison majeure d'exister. Et pour cause, il n'a ni gardé ses traditions de luttes sociales ni emprunté le train des grandes ruptures planétaires. Alors, on continue d'inventer pour lui, à moins que ce ne soit contre lui, les artifices de la célébration, comme si son unique angoisse est de trouver comment faire semblant : de travailler, de revendiquer et de célébrer. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir