L'Ordre des médecins ne nie pas la réalité endurée et par les médecins et par les patients qui ne savent plus «à quel saint se vouer» face aux mauvaises conditions rencontrées dans les structures sanitaires publiques. En effet, Mohamed Bekkat Berkani, ainsi que de la Conférence euroméditerranéenne des ordres médicaux et pneumologue exerçant à Alger , a mis l'accent, lors de notre entrevue au siège du conseil, sur le mécontentement des praticiens de la santé, exprimé par des grèves récurrentes. Les médecins exerçant dans le secteur public - toutes spécialités confondues - au nombre de 45 000 sur l'échelle nationale, ne sont pas appréciés à leur juste valeur, d'après notre interlocuteur. Les failles rencontrées dans le secteur sanitaire public ne relèvent pas de la responsabilité du médecin, selon lui, du moment que lui-même est victime de cette faille, en dépit de son statut social revendiqué. «Ce n'est pas de sa faute s'il n'y a pas assez d'ambulances ou d'autres moyens dans les structures sanitaires publiques. Lui-même souffre d'exercer en tant que cadre de la santé dans des conditions déficientes», a-t-il souligné, précisant que malgré les difficultés qu'endure le médecin algérien, il reste un médecin bien formé. «La preuve est qu'il est à la hauteur de sa fonction lorsqu'il pointe à l'étranger.» Les 3000 médecins exerçant dans des différentes spécialités en France assurent, selon ce président. Et ce, en dépit de la situation sociale du médecin en Algérie qui n'est nullement en harmonie avec ses études et sa responsabilité, selon notre interlocuteur qui estime que la profession médiale «gagnerait à être revisitée» en matière de formation continue post-universitaire, soulignant l'importance du recyclage des médecins algériens qui manque énormément. Et ce, de façon à éviter à certains médecins étrangers de se déplacer les week-ends en Algérie pour pratiquer - parfois illicitement - des actes chirurgicaux ou des cycles de formation rapides. Sans parler de ces médecins qui «ont fait une niche» dans le secteur public, en exerçant dans le secteur privé tout en percevant un salaire de l'Etat. «Il faut que le médecin soit payé pour travailler dans le secteur public et non pour pointer à chaque paye, histoire de marquer sa présence.» «Notre pays a choisi un système public dominant. Ce qui est très bénéfique, selon le docteur Bekkat, pour le citoyen qui jouit d'une couverture sociale. Nous sommes parmi les rares pays où les malades chroniques, à titre d'exemple, ne payent pas leurs traitements. Cependant, il serait bien que ce même système qui arrange le citoyen soit apte à soigner tous les Algériens. Or ce n'est pas tout à fait le cas.» «Il suffit de faire un tour du côté des associations qui travaillent au profit des insuffisants rénaux et au profit des cancéreux, à titre d'exemple, pour voir de plus près les carences», s'exprime le président du conseil, précisant que «le déficit en infrastructures en général et en médecine lourde en particulier se fait ressentir dans les plus importants CHU du pays. L'hôpital Mustapha Pacha date des années 1920 et aucun investissement jusqu'à présent n'a été à la hauteur de la médecine moderne. On est en 2010 et nos ambulances ont du mal à accéder aux urgences faute de réaménagement permettant une fluidité au passage». Le cadre du CHU de Parnet, qui date des années 1940, n'est pas des plus reluisants, si ce n'est quelques rénovations qui restent insuffisantes. Celui de l'hôpital Maillot, ce CHU «éjecté par les militaires», est resté à l'état désuet et n'arrête pas de se détériorer. «Les grandes villes, telles que Oran et Annaba, n'ont pas de CHU digne de ce nom. La preuve est que les patients de ces deux villes se déplacent dans la capitale pour se faire soigner.»