Condamné par la justice mauritanienne à 12 ans de prison assignés de travaux forcés, «Omar le Sahraoui» a été livré, avant-hier, aux autorités maliennes. Légale, l'extradition du principal auteur de l'enlèvement des humanitaires espagnols intervient au moment où Madrid commence à s'inquiéter sérieusement du devenir de ses deux ressortissants aux mains d'Aqmi. Omar Sid Ahmed Ould Hamma, surnommé «Omar le Sahraoui», de nationalité malienne, a été extradé dans la nuit de lundi à mardi vers le Mali en vertu d'un accord judiciaire conclu en 1963 avec la Mauritanie, explique-t-on. Mais, pour les observateurs avertis qui suivent de près l'évolution de la situation sécuritaire dans la région sahélo-saharienne, cette opération, menée dans la plus grande discrétion, relève plus de la mise en scène que de la galanterie protocolaire. L'extradition de ce dangereux personnage prélude, en effet, à sa libération prochaine… en échange de celle des deux humanitaires espagnols encore aux mains de l'émir Mokhtar Belmokhtar. En fait d'accords judiciaires, il s'agit bel et bien d'un marché conclu entre Aqmi, Madrid, Nouakchott, Bamako et Paris. Une transaction dont les termes consistent en la remise en liberté de «Omar le Sahraoui» et d'autres terroristes emprisonnés en Mauritanie, en échange de la libération de Albert Vilalta, 35 ans, et Roque Pascual, 50 ans, détenus depuis leur enlèvement quelque part au nord du Mali. Il n'est pas exclu également que Madrid verse une rançon de plusieurs millions d'euros aux ravisseurs. Ce marché intéresse au plus haut point les cinq contractants. Si le souci du gouvernement espagnol de libérer ses ressortissants se justifie, quand bien même la méthode utilisée est contestable, l'implication de la France, quant à elle, ne trompe pas sur sa peur de voir ses intérêts pris pour cible au Maghreb et dans le Sahel. En jouant l'intermédiation entre l'Espagne et la Mauritanie, la France s'assure surtout une porte de sortie d'une crise qu'elle a exacerbée depuis qu'une de ses unités militaires d'élite a lancé, le 22 juillet dernier, un raid meurtrier contre un bivouac d'Aqmi en vue de libérer le malheureux Michel Germaneau. Nouakchott, qui refuse tout contact avec les terroristes, s'en sort quant à lui par une pirouette ; l'extradition d'un dangereux criminel vers un autre territoire n'étant qu'une manière subtile de ne pas se déjuger devant son opinion au cas où l'encombrant prisonnier viendrait à être élargi par les voisins maliens. Bamako, qui ne peut rien refuser aux amis français, intercèdera certainement à la demande pressante des autorités espagnoles de libérer «Omar le Sahraoui» pour permettre à Vilalta et Pascual de rejoindre leurs foyers sains et saufs. Pour ce faire, les Espagnols et les Maliens ont déjà préparé le terrain, car ce n'est pas sans raison que la rumeur enfle sur le sort peu enviable qu'Abou Zeid entend réserver aux deux otages, alors qu'il est de notoriété que ces derniers sont aux mains de Mokhtar Belmokhtar. Belaouar, dit-on, n'est pas du genre à exécuter froidement ses otages pour des raisons mystiques. Il préfère plutôt les échanger contre des euros. Des millions d'euros.