Niant toute implication dans l'approvisionnement en armes des génocidaires au Darfour – les douilles made in China ne seraient que pure affabulation – la Chine populaire peut bien s'offrir un court temps de répit, le premier depuis l'attribution du prix Nobel de la paix au dissident Liu Xiaobo. Pourtant, l'administration US, qui s'en sort plutôt bien, selon le président Obama, ne donne pas de signes de vouloir desserrer l'étau autour de l'empire du Milieu. Si le gouvernement chinois peut se permettre un bol d'air c'est grâce au Parlement européen qui a attribué son prestigieux prix Sakharov pour la défense des droits de l'homme et pour la démocratie à un dissident cubain alors qu'il aurait bien pu le décerner à l'épouse de Liu Xiaobo, placée en résidence surveillée. Passés les chaleureux applaudissements à Bruxelles, tous les projecteurs se sont braqués sur l'île castriste. Amaigri part vingt-trois grèves de la faim, le dissident Guillermo Farinas a aussitôt dédié son prix aux «combattants de la liberté» à Cuba. Le «monde civilisé» peut s'adresser une nouvelle fois aux dirigeants cubains : il est temps que Cuba connaisse la liberté de conscience et la fin de la dictature. Autrement dit, il n'y a pas eu de miracles avec l'arrivée de Raul Castro au pouvoir. Les réformes politiques tant promises n'étaient que de la poudre aux yeux. Surtout aux yeux d'un Occident qui ne sait plus vraiment exporter sa grande démocratie. Si ce n'est par les guerres préventives, conduites par l'ancienne administration Bush et héritées par l'Amérique d'Obama. Nouri El Maliki peut continuer sa tournée des grands ducs, à la recherche d'un nouveau gouvernement pour la République démocratique d'Irak, et Hamid Karzaï peut se rabibocher avec les hommes liges du mollah Omar pour une incontournable restauration de la chariâ, l'Europe ne lâche pas de son regard fusilleur le régime castriste. Et ce n'est pas la récente libération de cinq dissidents cubains qui va bousculer la donne. Tant que les Castro n'auront pas, eux, lâché du mou, l'Europe et son allié américain les garderont à l'œil. Les réformes politiques et sociales qui leur sont réclamées doivent se traduire sur le terrain et doivent devenir visibles à partir des côtes américaines et de celles du Vieux continent. Car, à en croire les Occidentaux, le néosocialisme, antidémocratique par nature, n'est bon pour personne. Surtout si c'est le Vénézuélien Hugo Chavez, qui a dit à Bachar El Assad vouloir visiter le Golan après sa libération, se tient en première ligne de front contre l'occidentalisation, voire l'américanisation d'un monde déjà mondialisé. Le régime castriste saura-t-il surfer sur la vague démocratique que vient de susciter l'attribution du prix Sakharov, avant un «retour à la normale» ? Soit la reprise de la marche des néosocialistes, conduite par le président latino qui nationalise à tour de bras à Caracas ? Les Castro, aîné et cadet, seraient ainsi invités à céder le passage par les voies de la démocratisation aux quatre coins de l'île. Cinq décennies à résister à l'appel du large… démocratique serait l'une des plus grandes difformités de l'histoire. Quitte à se laisser prendre dans les filets du néocolonialisme que la Chine populaire est accusée avoir initié au Soudan, sans avoir pris la peine d'en discuter avec les grandes puissances occidentales ? Fidel et Raul sont priés de prendre leur courage à quatre mains et se jeter dans les eaux glaciales de l'Atlantique, il n'y a pas mieux que l'idéal démocratique pour prendre sa revanche sur le temps des embargos et des privations. Le régime castriste refusera-t-il la énième «invitation» de l'Europe à rejoindre le «monde civilisé»… de crise en crise ? Ce, après avoir repoussé la main tendue du président Obama qui s'était essayé à un rapprochement sans suite possible ? Au lieu de continuer de jouer la carte de l'usure et de la sélection naturelle, il serait mieux que «son» Amérique apprenne à négocier d'égal à égal.