Depuis le temps que des jeunes dealers traînent de Zoudj-Brel (frontière algéro-marocaine) de la poudre empoisonnante, des drogues de toutes natures et même de toutes nationalités, on n'a jamais vu un vrai dealer s'avancer vers les juges, bomber le torse et dire oui, c'est moi le fameux Djamel de Belouizdad ou encore le réputé Kamel de Bab El Oued qui inonde baïnem, birkhadem ou Kouba. Non, on n'a jamais vécu pareille situation. Le client de maître Mallia Bouzid est poursuivi sur la base des articles 17 et 18 de la loi du 25 décembre 2004 relative à la répression et à la prévention. Mohamed Lamari, le jeune procureur de l'audience correctionnelle du tribunal de Bir Mourad Raïs (cour d'Alger), était si bien dans sa peau ce jeudi, qu'il n'avait éprouvé aucune difficulté à requérir dans ce dossier de commercialisation de came, de détention et même d'usage (pour la seule avocate, il n'y a que le sniff et encore). Il est vrai que nos magistrats sont en train de bâtir une petite justice aux grands verdicts. La loi du 25 décembre 2004 n'a rien arrangé, elle a mis du flou dans le cerveau des magistrats. Ces derniers agissent, pour la grosse majorité, tels des robots. En effet, le concept de commercialisation, de trafic de drogue peut faire croire qu'ils ont affaire à des formes de cannabis ou autres chira, cocaïne et zetla. Or, dans ce dossier, le détenu avait sur lui cinq grammes de came, soit de quoi permettre à près de cinquante drogués de planer. Eh bien ! Pour la justice, c'est du trafic, pour les avocats c'est pour l'usage ! Allez trancher avec des représentants du ministère public qui ne font pas dans la dentelle. Par exemple, contre Halim S., jeune drogué, le parquetier a requis huit années d'emprisonnement. prenant à cœur son métier, Me Bouzid commence par le verset 34 et arrive à la tentation qui avait vu Adam céder aux clins d'œil de Satan, et ce, en plein Eden. «Nous ne pouvons plaider que le droit pur. les articles 15 et 17 de la loi contre la drogue ne peuvent être retenus. Le procureur a requis, en s'appuyant sur la rumeur qui fait croire que Halim était un dealer avéré et chez qui on pouvait s'approvisionner en toute quiétude. Et ce n'est ni Torki ni Berki qui vont pousser la justice à se prononcer. Depuis quand prend-on en compte les déclarations d'un inculpé sur un autre ? Ce n'est pas sérieux. A l'âge de vingt ans, peut-on prendre le risque de se balader dans les rues avec cinq grammes de came ? Les cinq grammes que Halim avait sur lui étaient pour sa consommation personnelle, il ne mérite pas de végéter en taule. Relaxez-le, car il n'y a aucune preuve qu'il soit un dealer, car le jour où il avait été pris, il était seul. Il n'y avait pas un seul client dont la présence aurait prouvé que Halim était dangereux, à envoyer à l'ombre pour très longtemps», balance l'avocate qui sera satisfaite avec les trois mois de prison ferme prononcés.