Mustapha Gagui, membre syndical à l'Union générale tunisienne du travail (UGTT), dont trois portefeuilles ministériels au sein du gouvernement de transition ont été refusés par cette formation importante, rencontré hier à Tunis, nous parle des manifestations populaires revendiquant la «chute du gouvernement» et fait «appel au peuple algérien pour soutenir la révolte tunisienne». Le Temps d'Algérie : Les manifestations se poursuivent, exigeant la chute du gouvernement de transition. L'UGTT soutient-elle cette démarche ? Mustapha Gagui : Nous soutenons et encadrons les revendications populaires, et ce, depuis le début des événements. Le gouvernement de transition comprend des ministres issus du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) et le peuple ne veut pas de ce parti. Ils doivent quitter leurs postes. C'est une revendication venant de toutes les franges, de toutes les tendances politiques et toutes les sensibilités du peuple tunisien.
Jusqu'à quand peut durer cette manifestation populaire ? Jusqu'à ce que les revendications du peuple tunisien soient satisfaites. Le peuple exige le départ de tous les symboles du RCD. Mon frère Saïd, qui était syndicaliste à l'UGTT, est décédé lors des événements du 26 janvier 1978, sous la torture au siège du ministère de l'Intérieur à l'époque. Moi-même j'ai été emprisonné en 1985. De nombreux autres Tunisiens ont connu le même sort. Nous ne voulons pas de l'ancien régime qui a privé les Tunisiennes et les Tunisiens de la liberté, de la démocratie et qui a torturé le peuple.
Est-il vrai que des craintes sont ressenties quant à l'éventualité de l'accès au pouvoir des islamistes en Tunisie ? Les aspirations du peuple et des partis politiques tunisiens est d'avoir le droit d'activité et d'expression à tous, sans exception, avec l'interdiction de l'exploitation de la religion en politique. Nous voulons une nouvelle Constitution et de nouvelles lois qui n'excluent personne, ni aucun parti politique, qui consacrent une rupture totale avec l'ancien régime, consacrent une rupture avec la pensée unique, consacrent les libertés individuelles et collectives. Nous sommes pour un régime démocratique et parlementaire qui réponde aux aspirations du peuple tunisien à la démocratie, la dignité et la liberté.
Pour quelles raisons vous êtes-vous retirés du gouvernement de transition ? Il faut vous dire que nous n'avions pas été informés de la composante politique du gouvernement de transition ni qu'il comprend des membres du RCD ; en l'apprenant, nous avons refusé d'entrer au gouvernement, avant même de prêter serment.
Etes-vous satisfait des mesures prises par le gouvernement de transition, dont l'amnistie générale ? Ce sont des revendications qui datent du début des années 1990, exprimées par l'UGTT, parmi elles l'instauration de la justice, la répartition équitable des richesses et la dissolution de la sécurité des établissements universitaires.
Quelle serait votre politique envers l'Algérie ? Nous militons pour un Maghreb arabe unifié, sans aucune séparation entre les peuples de la région, dépassant les frontières établies par le colonialisme.
Quel message voudriez-vous adresser au peuple algérien ? Nous demandons au peuple algérien de soutenir la révolte du peuple tunisien. Nous souhaitons de nos amis algériens de nous soutenir moralement.