Dans cet entretien express, Me Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (cncppdh), revient sur les principales mesures décidées par le chef de l'Etat lors du dernier conseil des ministres tenu jeudi dernier. Me Ksentini se dit convaincu de l'imminence de la levée de l'état d'urgence qui pourrait intervenir avant le 12 février. Le Temps d'Algérie : Lors du dernier conseil des ministres, le président de la République a pris la décision de procéder sous peu à la levée de l'état d'urgence. Est-il possible, selon vous, de voir cette décision concrétisée avant la date du 12 février, date retenue pour l'organisation d'une manifestation dont l'une des principales revendications a trait justement à la levée de l'état d'urgence ? Me Farouk Ksentini : Le président Bouteflika a été très précis en évoquant l'état d'urgence dont il a pris l'engagement solennel de procéder à la levée dans un proche avenir. A mon avis, la levée de l'état d'urgence devra donc intervenir incessamment. Maintenant, pour ce qui est d'avancer une échéance par rapport à la mise en application de cette mesure, il est possible qu'il sera décidé de mettre fin à l'état d'urgence avant le 12 février et peut-être même avant. Cela, d'autant qu'une telle procédure n'exige pas beaucoup de temps pour sa mise en application. Il est question simplement de l'annulation du décret paraphé en 1992 par le biais duquel l'état d'urgence a été instauré. En tout état de cause, le principe de la levée de l'état d'urgence est désormais acquis de façon irréversible. N'empêche que les manifestations dans la capitale sont toujours frappées du sceau de l'interdiction… Pour ce qui est de l'interdiction des manifestations publiques à Alger, les autorités publiques ont décidé du maintien de cette décision en s'appuyant sur des considérations d'ordre sécuritaire. La sécurité est en effet le premier des droits qu'il faudrait garantir aux citoyens. Cela dit, il est possible qu'avec le temps cette décision soit également révisée. L'autre décision prise par le chef de l'Etat c'est la dépénalisation de l'acte de gestion qui devra également intervenir sous peu. Quelle est votre appréciation à ce sujet ? C'est effectivement une décision que j'apprécie. Le fait que le président de la République ait pris l'engagement de dépénaliser l'acte de gestion est de nature à sécuriser les gestionnaires du pays, ce qui constitue, une fois de plus, une excellente nouvelle, dans la mesure où la gestion relève, d'une part, d'un domaine extrêmement délicat et, d'autre part, les magistrats algériens n'ont pas vraiment une maîtrise de la technologie de la gestion. L'acte de gestion, qui a été pénalisé pendant longtemps en Algérie, n'a pas été sans provoquer des dégâts. Certains médias étrangers disent que l'Algérie n'est pas à l'abri d'un soulèvement à l'image de ce qui se passe actuellement en Egypte ou encore en Tunisie précédemment, qu'en pensez-vous ? Honnêtement je ne suis pas acquis à ce genre d'analyses. Ce qui s'est produit dans ces deux pays ne peut se rééditer en Algérie, pour la simple et bonne raison que nous, en Algérie, on a déjà payé une lourde facture par le passé. D'autre part, nous avons réussi la réconciliation nationale. Ce dont nous sommes tenus en Algérie, c'est simplement de tenter de désamorcer des situations problématiques et éviter tout sujet de confrontation. La Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme se penche actuellement sur une enquête dans le secteur de l'éducation. Pourquoi une telle enquête et qu'en est-il des premières constatations relevées ? L'enquête en question est toujours en cours. Nous l'avons engagée car nous considérons d'abord que l'avenir de l'Algérie c'est son école et ensuite pour la simple et bonne raison que la scolarisation est un droit fondamental. Maintenant, pour ce qui est des premières conclusions de cette enquête, on a relevé quelques motifs de satisfaction tels le nombre de personnes scolarisées qui est de 10 millions et le montant du budget octroyé à l'éducation qui dépasse celui de la défense. Mais on a noté quelques insuffisances, entre autres la qualité de l'enseignement prodigué.