La part de l'industrie dans le PIB algérien n'a pas cessé de baisser depuis 20 ans pour atteindre les 5,3% en 2009. Le Premier ministre Ahmed Ouyahia se promet de relancer l'industrie algérienne. Ce secteur pourvoyeur d'emplois peut maintenir l'élite et les compétences algériennes dévastées par les importateurs de tous bords. La fierté industrielle des années 70 a été perdue. Les algériens ont même perdu les métiers d'antan, disant qu'il n'y a plus de métier avec le démantèlement de ce tissu économique. Quelles sont les raisons ? A qui profite cette situation ? Comment y remédier ? Ce sont entre autres les questions de cet entretien réalisé avec Lies Kerrar, expert en économie et président de Humilis Corporate Finance. Notre interlocuteur a tenu à nous expliquer ici les démarches à entreprendre afin de redynamiser l'industrie algérienne. Le Temps d'Algérie : Comment se porte, selon vous, le secteur de l'industrie en Algérie ? Lies Kerrar : De façon générale, il suffit d'observer la provenance de ce que nous consommons pour constater que la part de la production algérienne est peu présente. Et pour ce qui est produit en Algérie, le niveau d'intégration est encore faible. Une grande partie de la valeur ajoutée est encore réalisée à l'étranger, même dans le secteur de l'agroalimentaire qui a connu un important dynamisme ces dernières années. Il y a, par contre, des secteurs industriels qui se développent rapidement, comme le secteur pharmaceutique et celui de l'agroalimentaire. Comment expliquez-vous le déclin du secteur de l'industrie ? Il y a eu probablement plus d'activité industrielle dans le passé, notamment lors des périodes où l'économie algérienne était entièrement fermée. Il n'est, par contre, pas établi que cette activité industrielle ait été performante ni compétitive. Il est évident qu'une ouverture du marché sans avoir au préalable mis en place un environnement des affaires favorisant la compétitivité de nos entreprises a été fatal. L'industrie ne peut se développer que si elle dispose d'avantages compétitifs évidents. Le coût de l'énergie en est un. Il n'est par contre pas suffisant. Comment relancer ce secteur porteur pour l'économie nationale et toute la société algérienne ? Je n'aurai pas la prétention de vous tracer un plan de relance de notre industrie en quelques mots. Il y a par contre des réformes auxquelles nous ne pouvons pas échapper et que nous devons entreprendre pour mettre nos entreprises sur le chemin de la performance et de la compétitivité. D'abord, nous devons nous atteler à revoir tous les obstacles à l'amélioration de la productivité. Des progrès dans l'amélioration de notre environnement administratif peuvent avoir un effet non négligeable sur notre productivité. A titre d'exemple : donnons-nous pour objectif de réduire de moitié le nombre d'extraits de naissance nécessaires dans les démarches administratives. Il s'agit d'un objectif qui peut être réalisé sans pour autant réduire la fiabilité de nos systèmes de contrôle. Cette seule mesure aura un effet certain sur notre productivité par le seul fait que le temps consacré à ces démarches sera réduit et offrira plus de disponibilité pour produire. Ceci n'est qu'un exemple parmi des milliers de gisements d'amélioration de la compétitivité. La multiplication d'actions concrètes et positives pour améliorer notre productivité et notre compétitivité est nécessaire pour développer notre attractivité pour l'investissement industriel. C'est un travail de fond qui engage une forte mobilisation. Il y a actuellement une forte volonté de développer notre activité industrielle et nous disposons d'atouts importants pour cela : de l'énergie et d'importantes autres ressources naturelles, une demande intérieure substantielle, une démographie favorable, une épargne importante. Il nous appartient donc maintenant de mobiliser les compétences et de travailler dans le bon sens. Entretien réalisé