C'est de Sétif qu'est partie l'information : des patients avertis ont découvert dans les boîtes d'un antigrippal un médicament pour maladies cardiaques. Personne ne nous a dit si d'autres patients, moins ou pas du tout «avertis» de la wilaya la plus importante du pays en matière de population ont acheté ce médicament, combien en ont consommé et combien ont subi les conséquences de cette grave négligence. Il n'est peut-être pas besoin de sortir de la faculté de médecine ou de pharmacie pour au moins deviner qu'un quidam normalement constitué, mais indisposé par un rhume banal, à moins que ce ne soit par une grippe saisonnière n'a pas avalé un médicament pour insuffisants cardiaques sans risque. On ne nous a pas dit ça, même on nous a quand «rassurés» qu'il s'agissait de quelques boîtes dont on a malencontreusement inversé les emballages à l'unité Saidal de Batna qui alimente les pharmacies de la région. Ceux, avertis ou non, qui auront pris du Rhumafed à la place du Cardital doivent logiquement encourir un moindre risque. La preuve, personne n'a jugé utile de nous «rassurer» là-dessus. On allait quand même poser la question si un malade du cœur qui prend un médicament sans gros péril mais qui lui fait quand même oublier son traitement indispensable ne se met pas en danger, quand les autorités locales nous rassurent pour de bon : les boîtes en question ont été rapidement retirées du marché. Roule. Puis l'information a dépassé Sétif et Batna. Il ne s'agit plus d'une wilaya, il ne s'agit plus d'une région, ce ne sont plus quelques boîtes, mais des milliers, ce n'est plus une inversion d'emballages, mais de «médicament» dangereux. Et quand il n'y a plus personne pour rassurer, tout le monde peut le faire avec les moyens de «tout le monde». On saura ainsi, par sms ou par le net que tout le stock de Rhumafed disponible dans les pharmacies serait en fait un «cardiotonique», que c'est en fait d'une erreur dans la chaîne de fabrication qu'il s'agit et non d'inversement d'emballage, que beaucoup parmi les malades qui en ont pris sont dans un état critique… On attendait la conférence de presse des dirigeants de Saidal. Des choses graves allaient être annoncées, nous avait-on dit, des têtes allaient tomber. Finalement, le PDG de Saidal est venu vers la presse, flanqué du… ministre de la santé. M. Derkaoui devait manifestement partager avec sa tutelle l'honneur de la bonne nouvelle : l'histoire n'était qu'une rumeur. Malveillante dans le meilleur des cas, criminelle dans le pire. Une fois n'est pas coutume, il y avait quand même une petite fumée sans feu : sur les boîtes de Rhumafed, il y avait quand même dans un coin l'inscription «Cardital». Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir