Des dizaines de milliers de manifestants ont à nouveau réclamé hier au Yémen le départ du président Ali Abdallah Saleh, tandis que des violences dans le sud du pays ont coûté la vie à trois soldats et un policier. D'après des témoins, environ 5000 opposants ayant campé durant la nuit près de l'université de Sanaa, la capitale, ont scandé : «Nous avons une exigence : la chute de l'oppresseur.» «Va-t-en avec ta corruption» ont aussi lancé les protestataires. Les manifestants, qui réclament la fin du régime de Saleh, au pouvoir depuis 32 ans, étaient jusqu'à présent essentiellement issus du milieu étudiant et de l'opposition politique, mais leurs rangs ont été gonflés lundi par l'arrivée de membres de nombreuses tribus, qui forment le tissu social du Yémen. Des mouvements islamistes ont aussi participé à des rassemblements. Les manifestants ont formé plusieurs groupes autour du campus universitaire, certains agitant des drapeaux aux couleurs nationales - noir, blanc, rouge -, d'autres chantant et dansant. A Ibb et à Houdeïda, deux villes du nord, des milliers de personnes se sont rassemblées. Au moins 10 000 manifestants sont descendus dans les rues de Taiz, à 200 km au sud de la capitale. Plus d'un mois après son lancement, le mouvement de contestation au Yémen, inspiré par les révoltes populaires tunisienne et égyptienne, a désormais gagné tout le pays. Les violences contre les forces de sécurité se sont accentuées, même si l'on ignore quels en sont les auteurs. Deux militaires ont été tués et onze autres blessés hier dans deux attaques distinctes menées par des inconnus armés à Makhzan, dans la province troublée d'Abyan, selon un responsable ayant mis en cause Al Qaïda. Dans la province d'Hadramout, le responsable local des services de renseignement a été abattu samedi par des assaillants circulant à moto, rapportent les autorités. Une mutinerie a en outre éclaté dimanche dans une prison de la province de Mahra, dans le sud, près de la frontière avec Oman. Un détenu est mort dans des affrontements avec les forces de l'ordre. Quatre prisonniers se sont évadés. Ali Abdallah Saleh a rencontré au cours du week-end les commandants des forces armées. Il leur a rappelé qu'ils étaient les garants de la sécurité et de la stabilité du pays face à ce qu'il a qualifié de complot contre l'unité du Yémen, selon l'agence officielle de presse Saba. Par ailleurs, le président Ali Abdallah Saleh est prêt à former dans un délai de quelques heures un gouvernement d'union avec l'opposition au Yémen, a indiqué une source gouvernementale. La présidence attendrait néanmoins que l'opposition lui soumette des noms pour les postes ministériels, a poursuivi la même source. L'opposition a rejeté cette offre et dit rester aux côtés de la population qui manifeste pour la chute pure et simple du régime.