Pour la deuxième fois ce mois, près d'une centaine de citoyens de La Casbah ont tenu hier un rassemblement devant le siège de l'APC pour exiger l'installation d'un nouveau maire. L'Assemblée est sans tête depuis la destitution de Amar Ztéli en mai 2010. L'administration continue de refuser d'installer le candidat soutenu par la majorité des membres de la commune pour des raisons qui échappent aux habitants et aux élus. L'occasion n'est pas des moindres. C'était au moment où l'Assemblée populaire nationale (APN) a commencé hier à examiner, entre autres, l'avant-projet du nouveau code de la commune que des élus et des habitants de La Casbah ont organisé un sit-in à l'entrée du siège de l'APC, boulevard Che Guevara. Ils étaient près d'une centaine de citoyens à répondre présents au rendez-vous. Très en colère, ils ont revendiqué une seule chose : l'installation par l'administration d'un président d'APC. La demande n'est pas nouvelle. Elle vient d'être renouvelée. Les citoyens n'arrivent pas à comprendre pourquoi il y a un blocage qui perdure là où il suffit à la wilaya déléguée de Bab El Oued d'appliquer les dispositions du code communal en vigueur ni plus ni moins. Pourtant, en 2009, quand la commune de Dély Ibrahim se débattait dans un problème similaire, la wilaya a su trouver une solution au blocage de l'APC, en appuyant la majorité des élus qui voulaient voir Kamel Hamza succéder à Brahim Sadrati. Pourquoi ce qui était possible à Dély Ibrahim ne l'est pas à La Casbah ? Des administrateurs en violation de la loi Le rassemblement d'hier est le deuxième du genre depuis le début de ce mois. Dans les quartiers, les gens commencent ainsi à prendre conscience du danger que représente la vacance du poste sur la gestion des affaires locales. L'Assemblée de La Casbah, bloquée depuis son installation dans des conditions particulières en décembre 2007, n'a pas de chef depuis début mais 2010. A l'occasion d'une plénière tenue fin avril, le président d'APC, Amar Ztéli, qui était à son second mandat comme premier magistrat de la commune et à son troisième en tant qu'élu, a été destitué par un vote de défiance. A cause de la mauvaise gestion des affaires locales, 10 élus sur 15 lui ont retiré leur confiance. Le 12 mai, le wali approuve l'action de la majorité des élus et décide par la même occasion de nommer provisoirement un administrateur en attendant la désignation d'un nouveau P/APC. Selon le code de la commune, un administrateur gère l'APC pour une durée d'un mois. A La Casbah, le titulaire du poste a assuré ses fonctions jusqu'à septembre de la même année, en violation de la loi. Il a fallu que la presse, citant une source du ministère de l'Intérieur, révèle que l'administrateur a été poursuivi et emprisonné pour terrorisme, installé à La Casbah sans l'enquête d'habilitation d'usage, pour que la wilaya le suspende et désigne un remplaçant. Pour lui succéder, les autorités ont cette fois-ci jeté leur dévolu sur la directrice des finances de l'Assemblée. Celle-ci gère les affaires courantes en violation flagrante de la loi puisqu'elle est toujours en poste, six mois après sa désignation. En parallèle à la valse des administrateurs, la majorité des élus qui soutiennent Farid Boussahia. Elu FLN et candidat au poste de président de l'Assemblée, il n'a jamais été accepté par la wilaya et la wilaya déléguée de Bab El Oued. Les autorités se cachent à chaque fois derrière une «interprétation» de la loi pour ne pas avoir à intervenir dans un dossier où la direction nationale du FLN serait impliquée. Ses militants sont en effet majoritaires à La Casbah (8 sur 15). * «Allez voir ailleurs !» Le statu quo était de rigueur jusqu'à début octobre 2010. A cette date, des élus tablaient sur un changement d'attitude de l'administration à l'occasion de l'arrivée d'un nouveau wali délégué à la circonscription administrative de Bab El Oued, Amar Zerfa. Approché quelques jours après son installation, M. Zerfa a naturellement demandé à prendre son temps afin d'étudier minutieusement le dossier. Les élus lui ont accordé ce qu'il a demandé. Relancé dernièrement sur le sujet par une délégation de la population, il a toutefois étonné son monde. «Il nous a dit d'aller voir ailleurs (il faut comprendre : le ministère de l'Intérieur) !», indique-t-on. Dans la vieille ville de la capitale, on spécule sur ces «tireurs de ficelles», largement impliqués dans cette affaire, qui restent dans l'ombre, mais qui sont suffisamment forts pour peser sur le cours des événements et empêcher les autorités locales d'installer un P/APC, comme le souhaitent la majorité des élus. Initialement, ce blocage est le résultat logique d'une mésentente profonde entre les membres de la liste FLN. Cela avait commencé par des critiques du bilan jugé négatif de M. Ztéli qu'on n'a pas souhaité voir présider aux destinées de la ville pour un second mandat consécutif. La mésentente s'est transformée par la suite en clivage avec l'éclatement de la liste FLN en deux clans déterminés par les appartenances régionales. Aux dernières nouvelles, malgré sa destitution, il s'avère que l'ancien président continue à avoir un droit de regard sur tout ce qui se passe au boulevard Che Guevara. Il dicterait de l'extérieur ses instructions à l'administratrice, accusent des élus. En cela, les coups de téléphone semblent suffire. Les partisans de M. Ztéli l'avaient prédit dès le départ. «Les choses vont rester comme cela jusqu'en 2012.» Chaque jour qui passe leur donne raison.