La politique étrangère américaine au Proche-Orient aurait-elle connu des changements significatifs depuis le discours du président Obama au Caire ? A moins de les chiner à la loupe, l'administration US perpétue sa stratégie d'avant l'arrivée des démocrates à la Maison-Blanche : la sécurité d'Israël d'abord, la paix en dernier lieu. Ce n'est pas que le président US a perdu tout espoir de concilier les deux, mais sans la première il doit se préparer à faire ses adieux sur le perron de la White House. Bref, sa réélection passe forcément par une batterie de gages qu'il se doit de donner aux traditionnels soutiens de son camp, les lobbys juifs aux Etats-Unis. C'est fait, son message est parvenu jusqu'à Tel-Aviv. Avigdor Lieberman n'a pas eu tort d'affirmer que l'Etat hébreu ne stoppera pas la colonisation ne serait-ce que pour trois heures. Alors que le président Obama n'a pas terminé son discours que le gouvernement Netanyahou a annoncé la construction de 1520 nouvelles unités habitables à Al Qods Est, la partie de la vieille ville sur laquelle les Palestiniens comptent implanter leur future capitale. L'expansionnisme israélien n'est pas de nature à permettre d'entretenir un tel rêve, l'Etat hébreu considère toujours Al Qods comme capitale éternelle, indivisible. Ainsi, une relance du processus de paix sur la base des frontières de 1967 serait totalement utopique malgré l'appel franc d'Obama en ce sens. Une autre paix est-elle possible ? Ce n'est pas sorcier, il suffit de revenir six mois en arrière pour mieux cerner la démarche que l'Amérique croit la plus adaptée pour harmoniser sécurité et paix. Soit, au début des révoltes dans le monde arabe. Parce que les renversements au nom de la démocratie occidentale a fait ses preuves dans les vieilles Républiques satellitaires du bloc soviétique au lendemain de la chute du mur de Berlin et parce que les vieux amis dictateurs arabes ne le sont plus que Washington va continuer de calquer le même schéma dans le monde arabo-musulman. Au nom de la démocratisation et du début de la fin du soviétisme arabe, les courageux peuples tunisien et égyptien vont bénéficier de l'aide des USA afin que soient récupérées toutes les fortunes pillées par les Moubarak et les Ben Ali. Entre-temps, l'Amérique d'Obama fera tout ce qu'elle pourra pour que le pouvoir ne demeure pas aux mains d'individus. D'une pierre trois coups. Le Yéménite Ali Saleh est enjoint à signer le plan du CCG et à partir durant le mois suivant cet accord, le Libyen Kadhafi est sommé de partir, la Jamahiriya n'a aucun avenir avec lui et le Syrien Al Assad est averti qu'en cas de non-respect du calendrier de réformes et la poursuite de la répression il devra s'attendre à faire face au pire. Et, semble-t-il, ce ne sont pas ses fidèles alliés iranien, russe et chinois qui vont pouvoir le mettre à l'abri. Quant aux monarchies arabes, dont son allié bahreïni, elles sont invitées à intensifier le dialogue avec leurs oppositions respectives, la démocratisation admet également la règle des deux poids deux mesures. Ce n'est qu'une fois tout ce beau monde démocratisé qu'Obama, si bien sûr il est réélu, envisagera la paix selon les nécessités sécuritaires d'Israël et les appétits économiques de l'Amérique et de ses alliés européens. Via une conférence internationale où toutes les parties en conflit au Proche-Orient seront représentées ? A défaut d'avoir affaire à des pro-occidentaux déclarés, Washington espère beaucoup plus de modération chez les nouveaux et les futurs dirigeants du monde arabe. Autrement dit, qu'ils fassent preuve de compréhension face à l'Etat hébreu, voire lui concéder ce qu'il continue de chaparder à travers la colonisation, version Netanyahou. En attendant que celui-ci rencontre Obama, comme si de rien n'était, beaucoup n'espèrent plus rien. La résistance peut continuer.