Face à la polémique qui s'installe au sein de la communauté des scientifiques et les interrogations soulevées par les pharmaciens, les producteurs et les simples citoyens qui utilisent des produits fabriqués avec des parabènes, le Pr Belmahi Mohamed El Habib, toxicologue, chef de service de toxicologie au CHU de Constantine et membre du comité national de pharmacovigilance, a répondu à nombre de nos interrogations. Depuis quand l'utilisation des parabènes prête-t-elle à controverse ? En 2010, l'utilisation des parabènes a créé la polémique en raison de leur capacité à activer les récepteurs des œstrogènes, induisant une possible action sur la fertilité et les tumeurs œstrogéno-dépendantes, comme le cancer du sein. Combien de produits pharmaceutiques contiennent des parabènes ? A l'heure actuelle, il y a 1096 spécialités pharmaceutiques qui utilisent ce conservateur sous ses différentes formes, essentiellement ses formes de méthyl et propyl. Sur le plan de la toxicité, des études in vivo (sur les animaux) et in vitro (culture cellulaire) ont démontré que les parabènes exercent une activité œstrogénique faible qui est de l'ordre de 10 000 à 100 000 fois inférieure à celle de l'œstradiol qui est une hormone humaine. Avant 2004, est-ce qu'il fallait rester sur une présomption mal définie et sur un rapport bénéfice-risque très faible ? C'est à partir de cette année-là qu'une étude anglaise a démontré sur les 20 échantillons de tumeurs cancéreuses du sein, la présence de traces de parabènes sur 18 échantillons. Ce travail a été remis en cause par certains toxicologues sur le fait que la confirmation devrait être réalisée sur des cellules cancéreuses et sur des cellules saines et que rien n'écartait la contamination de ces cellules par le traitement anticancéreux. L'Afssaps a engagé une étude avec 6 laboratoires dont les résultats ne seront connus qu'au mois de novembre prochain. Qu'en est-il d'une éventuelle interdictionde l'utilisationdes parabènes ? L'étude est toujours en cours mais si on doit écarter les parabènes dans l'immédiat, cela signifie une modification des AMM (autorisation de mise sur le marché) de tous les produits commercialisés. Nous restons sans alternative immédiate, et pour le moment le rapport bénéfice-risque reste positif. Comment définissez-vous la situation ? Actuellement, ça reste une polémique sans fondement scientifique.