Le football algérien ne serait-il voué qu'à subir les retombées des carences de ceux qui s'y intéressent, presse sportive en premier lieu ? La débâcle des Verts à Marrakech face au onze marocain n'est que la énième d'une très longue série et l'on continue à croire que le fond du problème réside dans les mauvais calculs de leur entraîneur ou dans la sélection d'untel au détriment de celle d'un autre. Il y a, pourtant, un homme qui mettait en garde tout ce beau monde au moment où tout était beau et pas un nuage n'obscurcirait le ciel de cette équipe nationale. L'homme en question est Rabah Saâdane celui-là même qui avait contribué à mener les Verts à la dernière Coupe du monde. Quand il s'exprimait en conférence de presse il n'hésitait jamais à demander à l'assistance d'éviter de tomber dans l'optimisme béat. Même après Oum Dourmane, même après la qualification historique à la Coupe du monde de 2010, même après un succès glorieux face à l'équipe égyptienne, il se permettait d'affirmer que le onze égyptien en question était bien plus fort que le nôtre dont la victoire n'avait été que le fruit d'une certaine volonté des joueurs qu'à un réel talent de leur part. Dans la foulée, nous ne renoncions jamais à écrire que cette équipe nationale algérienne avait, peut être, un certain mérite à avoir obtenu une place pour le Mondial mais en aucun cas il ne fallait voir en elle l'image d'une grande équipe. Et une grande équipe nationale l'Algérie n'en a plus eu depuis la décennie 80 avec la qualification à la Coupe du monde de 1982 et celle de 1986. La faute à quoi ? La faute à une totale absence de réforme dans le football algérien qui a commencé à décliner dès que les entreprises publiques se sont retirées de la gestion des clubs en 1989. " Qui sème le vent, récolte la tempête " a-t-on coutume de dire. D ans ce sport, comme on n'a rien semé, il est parfaitement logique de ne rien récolter. Ou plutôt si, on a semé mais pas de la bonne graine. Disons de l'ivraie, cette plante sauvage nuisible à la pousse des céréales. En la circonstance cette ivraie là a empêché tout cheminement vers la construction d'une nouvelle équipe nationale qui soit aussi performante que les précédentes. Ce fut l'ivraie du bricolage, de la gestion à l'a peu-près, de l'anarchie, des magouilles, des combines et nous en passons. Que des carences qui ont freiné le développement de la discipline et qui ont transformé la base du système, c'est-à-dire les clubs, en un vaste bazar où tout se vendait et s'achetait trop souvent avec l'argent de l'Etat. Les mêmes erreurs et les mêmes procédés A partir du moment où ces clubs faisaient du n'importe quoi mais surtout pas de la formation solide et pérenne, comment voulez-vous que tout entraîneur national ne se mette pas à aller prospecter au sein de notre émigration ? Et celle-ci ne peut donner plus que ce qu'elle a sachant que les meilleurs préfèrent endosser le maillot national du pays où ils sont nés et où ils vivent. Ce ne sont donc que des joueurs très moyens qui sont venus défendre les couleurs de l'Algérie et non des stars mais certainement des joueurs mieux formés que ceux qui " hantent " les terrains des stades d'Algérie dans des championnats complètement déglingués. Après la défaite de Marrakech, on a trouvé le moyen de parler de chances de qualification à la CAN 2012 pour les Verts. Et puis après ? Supposons que ces Vers finissent par obtenir cette qualification, qu'est ce que cela va changer à ce que nous savons ? Vont-ils gagner cette CAN ? Jamais de la vie. Mais tout le mal qui ronge le football et ses clubs restera et lorsque l'équipe nationale subira une autre débâcle on osera parler de catastrophe jusqu'à demander la tête de l'entraîneur national lequel avait été celui qui avait été le plus réclamé au départ. Comme si le remplacement de l'entraîneur national allait tout régler. Comme si Le Guen, Lippi, Milutinovic, Halilhodzic, Zico ou tout autre coach de renommée étranger allait nous bâtir une équipe nationale de très grande envergure, capable de battre n'importe qui et qui soit compétitive sur des années. Comment cet entraîneur étranger s'y prendra-t-il pour rendre performants des joueurs lors de stages dont le plus long ne dépassera pas cinq jours ? N'oublions pas que les sélections nationales ne sont réunies qu'à l'occasion des dates FIFA. Du fait qu'il n'y en a que quatre ou cinq par saison, notre entraîneur ne pourra faire travailler ses joueurs que sur un maximum de vingt cinq jours par exercice sportif sauf dans la cas où ladite sélection va disputer un tournoi continental ou mondial. En somme ce coach étranger qui sera payé comme un nabab ne travaillera que quatre ou cinq fois par an. Soyons sérieux. En 1996, après que l'équipe nationale eut été éliminée d'entrée de jeu de la Coupe du monde de 1998 par une très modeste sélection kényane, le ministre de la Jeunesse et des Sports avait pris la décision de suspendre les présidents et les comités directeurs de la FAF et de la LNF. Nous avions, à ce moment là, préconisé l'arrêt, pendant un bon moment, de toute participation de notre équipe nationale à des compétitions internationales, le temps de rebâtir la maison du football algérien et de lancer un vaste programme de formation. Rien de tout cela n'avait été fait et jusqu'à aujourd'hui nous en sommes à rechercher une équipe nationale enfin compétitive sur la durée et non pas sur un seul match. On veut bâtir sur du néant Qu'on ne vienne, donc, pas réclamer un entraîneur pour l'équipe nationale. L'urgence ne se situe pas à ce niveau. Elle est dans le courage que l'on doit prendre pour tout réformer et dans celle de donner à ce football un vrai championnat professionnel, disputé par d'authentiques clubs professionnels dotés d'une base d'entraînement et une autre de formation, ayant un vrai conseil d'administration et pas dirigés par certaines personnes dont le seul souci est de demander toujours et encore plus à l'Etat. En dehors d'une telle démarche il n'est point de salut. Ce que l'on constate, malheureusement, c'est qu'on crie partout qu'il faut réformer l'équipe nationale en y injectant du sang neuf et lui donner un supposé grand entraîneur. De réforme du football il n'en est pas du tout question. C'est-à-dire que l'on se contente de ce championnat bancal, qui traîne sa misère sur de longs mois jusqu'à plus n'intéresser personne. Mais alors où il est ce sang neuf que l'on cherche à introduire dans cette équipe nationale ? Ces joueurs dont les prestations de week-end en week-end ont l'effet d'un véritable somnifère ? Le réalisme a du, certainement, fuir ce pays pour que l'on continue à se laisser aller à la rêverie. La FAF se dit prête, pour contenter le public algérien, à engager de gros frais en recrutant un entraîneur étranger. Elle ferait mieux de songer à économiser cet argent pour l'investir dans des créneaux autrement plus porteurs car ramener un entraîneur pour bâtir une équipe nationale avec presque du néant équivaudrait à jeter de l'argent par les fenêtres. Le populisme est traître et vous amène à énormément gaffer. Des gaffes on en commet depuis des lustres dans le football algérien. Il serait, peut-être, temps de revoir sa démarche au nom de la logique qui veut qu'une grande équipe nationale se bâtit sur un football sérieux et fort.