Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH), Me Farouk Ksentini, a indiqué dans son rapport remis au chef de l'Etat que «la détention préventive est une grande faiblesse du système judiciaire» et a remis en cause le taux officiel de 11% des personnes en détention par rapport à la totalité des détenus. Contacté par nos soins, le président de l'union nationale des bâtonnats d'Algérie, Mustapha Lanouar, a émis un autre avis au sujet de la détention préventive. Selon le président de l'Union des bâtonnats, «la décision de détention préventive relève du juge et non du ministre de la Justice Tayeb Belaiz. Aucun responsable algérien ne peut décider à la place du juge quant à la durée de la mesure de détention préventive qui pourrait être prise à l'encontre d'un citoyen. Cela relève de la conscience d'un magistrat et de la nature du dossier. Cet aspect ne peut obéir à la loi mais obéit à l'appréciation du juge d'instruction», a tenu à expliquer M. Lanouar, tout en ajoutant que «la personne mise en détention préventive est protégée par loi jusqu'à la fin du procès». Notre interlocuteur a reconnu, cependant, le recours systématique par les juges à la détention préventive, en estimant que les autorités publiques ne peuvent pas interférer dans les affaires de justice et sont tenues de respecter les décisions des magistrats, tel que stipulé dans la Constitution algérienne. Contrairement au rapport de Me Ksentini qui interpelle le président de la République sur «l'usage abusif et systématique de la détention préventive», le président du bâtonnat d'Algérie a estimé qu'«il n'y a pas lieu de s'alarmer». Dans son rapport remis il y a quelques jours au chef de l'Etat, le président de la CNCPPDH a fait état d'un taux élevé de personnes placées en détention préventive. Me Farouk Ksentini a contesté le taux de 11% des citoyens en détention préventive par rapport à la totalité des détenus, estimant que ce chiffre est beaucoup plus important. Il a ajouté que ses critères de détention préventive diffèrent de ceux du ministère de la Justice : «La loi considère en état de détention préventive toute personne qui n'est pas définitivement condamnée, alors que le ministère de la Justice considère en état de détention préventive uniquement les personnes placées en détention préventive par le juge d'instruction», a-t-il expliqué. Autrement dit, un accusé est considéré innocent tant qu'il n'a pas été jugé coupable par un tribunal. Il se trouve que le fait d'emprisonner un accusé peut être assimilé par l'opinion publique à une déclaration de culpabilité. Le président de la CNCPPDH a confié que la détention préventive a causé des dégâts dans beaucoup de familles.