Mahmoud Abbas a été contrarié par l'attitude des diplomates américains qui ont défilé tout au long de ces dernières semaines à Ramallah dans le seul but de le convaincre de renoncer à son projet de porter la question de la reconnaissance internationale de l´Etat de Palestine devant les Nations unies. Tony Blair le «diplomate israélien» «Il n´y a pas d´autre alternative à la reconnaissance de l´Etat palestinien que le dialogue avec Israël !», lui ont répété sur ton pressant les deux envoyés spéciaux du Département d´Etat, David Hale et Denis Ross. Les émissaires américains, en lui remettant une déclaration en ce sens, signée par les Etats-Unis et les pays de l´Union européenne, lui demandent de renoncer à son projet. Ce texte, rédigé de la main de Tony Blair, l´Envoyé spécial du quartet au Proche-Orient, ne fait pas la moindre référence au gel des colonies juives à l´est d´Al Qods, condition sine qua non des négociateurs palestiniens à une reprise du dialogue avec les Israéliens. Avant son départ, hier, pour New York où il doit assister aux travaux du quartet, composé des Etats-Unis, de l´Union européenne, de la Russie et de l´ONU, convoqué à la hâte pour une ultime pression sur le président palestinien, le plus fin des diplomates palestiniens est excédé par l´attitude franchement pro-israélienne de Tony Blair qu´il n´hésite pas à qualifier de «diplomate israélien». Le chantage américain Au passage, les émissaires américains ont signifié au président Abbas que les Etats-Unis couperaient l´aide de 500 millions de dollars qu´ils accordent, annuellement, à la Palestine, s´il refusait de renoncer à son projet. Un chantage inacceptable aux yeux du leader palestinien qui avait déjà reçu des garanties sur l'aide financière conséquente de l´Arabie saoudite. Excédé par l´attitude des Etats-Unis mais rassuré par le soutien financier et politique arabe, Mahmoud Abbas est passé à l´action. Jeudi dernier, il annonce qu´il présentera, le 23 septembre prochain à New York, son projet d´adhésion de la Palestine à l´ONU, mettant au pied du mur le quartet. Son projet a sans doute toutes les chances d´être adopté par l´Assemblée générale où 126 Etats reconnaissent déjà l´Etat palestinien. Ce sera, toutefois, une simple résolution politique, certes moralement très importante mais juridiquement sans force obligatoire, car elle ne donne pas le droit à la Palestine de devenir membre de plein droit de l´ONU. Les Etats-Unis ont déjà fait savoir, en effet, qu´ils mettront le veto au projet de Mahmoud Abbas s´il venait à être présenté au Conseil de sécurité dont seules les résolutions sont exécutoires. Le quartet au pied du mur Washington et la plupart des pays de l´Union européenne veulent forcer le président Mahmoud Abbas à négocier son projet avec Israël lequel a dressé, pourtant, tous les obstacles possibles pour, précisément, paralyser depuis trois ans la mise en œuvre de la «Feuille de route» du quartet sur la «solution de deux Etats», l´un palestinien et l´autre israélien. Mahmoud Abbas sait que son projet ne passera pas au Conseil de sécurité. Les Américains et les Européens, eux, savent, de leur côté, que le président palestinien les a mis au pied du mur par sa décision. Ils ont conscience que Mahmoud Abbas les a forcés à assumer leur responsabilité historique envers la Palestine ou assumer les conséquences du veto américain auprès de l´opinion publique dans le monde arabe. C´est pourquoi, en convoquant le quartet, ils ne veulent pas courir le risque de voir le «Printemps arabe» se transformer en révoltes populaires arabes contre le «bloc occidental» qui s´oppose à la création de l´Etat de Palestine. Négocier quoi ? Hier, les puissances occidentales membres du quartet, dont la France et le Royaume-Uni, n´avaient encore rien à proposer de «crédible» au négociateur en chef palestinien Nabil Chaat, que la nécessité d´ouvrir le dialogue avec Israël. Aucun engagement écrit sur la reconnaissance de l´Etat palestinien au cas où Israël persistait dans son refus de geler la construction de colonies juives en Cisjordanie. Un appel au dialogue qui prend les allures d´une manœuvre pour gagner du temps puisque Israël continue de camper sur ses positions : il n´entend pas geler, comme l´exigent les Palestiniens, la perpétuelle colonisation juive de la Cisjordanie, ne veut rien entendre du droit au retour des réfugiés de 1948, ni du statut de la ville sainte d´El Qods comme capitale de la Palestine, ni encore moins du retour aux frontières d´avant la guerre des six jours de 1967 remontant à l´armistice de 1948. «Négocier quoi» avec Israël ? C´est la réponse que Nabil Shaat a réservée, hier, au bloc occidental du quartet, lequel n´avait rien de consistant à offrir aux Palestiniens.