Pour une fois, le premier responsable de la santé reconnaît publiquement que son secteur a connu une «dégradation» mais qu'il imputera aux années de terrorisme. Secundo, il reconnaîtra sa responsabilité quant aux retards dans l'importation du médicament. Commençant par déclarer que les problèmes «dont souffre le secteur de la santé ne datent pas d'aujourd'hui mais remontent à 24 ans», Djamel Ould Abbas qui répondait, dimanche, aux préoccupations des députés à l'APN à l'issue de l'examen du projet de loi de finances 2012, avouera que le secteur a connu une dégradation, notamment durant les années de terrorisme où «plusieurs professeurs et médecins ont été assassinés». Une justification qui ne tient pas la route pour nombre d'élus dans la mesure où le secteur est l'un des premiers à bénéficier de budgets conséquents depuis au moins quelques années. Se mettant dans la peau d'un «redresseur», Ould Abbas affirmera avoir été désigné à la tête du secteur «non pas pour gérer la crise mais pour régler les problèmes qui se posent», précisera-t-il, tout en expliquant que «la santé est l'affaire de tous». La situation catastrophique a néanmoins, selon lui, été redressée depuis son arrivée à la tête du secteur. «J'ai trouvé le secteur de la santé en effervescence en raison de plusieurs mouvements de grève», explique-t-il non sans rappeler qu'il a été «contraint d'engager un dialogue et des négociations qui ont débouché, a-t-il tenu à préciser, «sur la promulgation de 16 statuts et 21 régimes indemnitaires en vue de stabiliser le secteur». D'ailleurs, pour étayer ses propos, Ould Abbas a rappelé que son secteur occupe la troisième place en matière de recrutement de main-d'œuvre après les secteurs de l'Education et de l'Intérieur. Tout en passant en revue les problèmes qui entravent le bon fonctionnement des services de la santé publique dont les pannes de nombre d'appareils médicaux et la surcharge des salles d'accouchement, Ould Abbas s'empressera de rappeler d'autres «réalisations» de l'année écoulée, notamment l'affectation de 1966 nouveaux spécialistes de la santé dans différentes régions au niveau des hauts plateaux et du Sud, précisant que des logements de fonction leur ont été garantis. S'exprimant sur le calvaire que vivent les cancéreux et leur prise en charge quasi inexistante, Ould Abbas justifiera cet état de fait par le manque d'appareils de radiothérapie. Il promettra dans la foulée la dotation des hôpitaux de plusieurs appareils de radiothérapie. Pénurie de médicaments, rupture de stock… «C'est la faute aux importateurs» Sur l'épineux dossier des médicaments ainsi que les raretés et les ruptures fréquentes de stock, le premier responsable du secteur de la santé avouera l'existence d'un retard dans le programme d'importation dont il prend la responsabilité mais n'omettra pas de désigner du doigt les importateurs. Ould Abbas a donc reconnu sa responsabilité concernant «le retard enregistré quant à la définition du programme d'importation des médicaments», imputant cela aux pratiques de certains importateurs qui «gonflent leurs factures». Quid des ruptures de stock? Comme à son accoutumée, Ould Abbas affirmera en marge de la plénière que cette rareté est avoulue et fabriquée de toutes piècesa. Le programme d'importation des médicaments, avait-t-il expliqué «sera défini avant le 15 novembre prochain», a-t-il révélé, non sans afficher sa détermination à baisser la facture d'importation estimée actuellement à 2,5 milliards de dollars. Ould Abbas accusera dans ce registre les importateurs qui ne veulent pas que la production nationale se développe. Il précisera que son annonce de hisser à 70% le taux de production nationale de médicaments «a touché de grands intérêts, d'autant que cinq importateurs enregistrent d'importants bénéfices». Le ministre indiquera enfin avoir soumis au gouvernement un projet de décret portant restructuration de la pharmacie centrale des hôpitaux (PCH) pour une meilleure organisation de la distribution des médicaments de base. Son secteur, a-t-il encore dit, a eu l'aval du premier ministre pour l'importation dans les deux semaines à venir d'un stock de médicaments nécessaires qui couvre les besoins des hôpitaux pour trois mois. Bien que le ministre ait reconnu les défaillances de son secteur, promettant de tout faire pour redresser la barre, il demeure que «l'effervescence» qu'il a évoquée reprend aujourd'hui avec la grève des spécialistes de la santé publique.