La France et les Etats-Unis voulaient éliminer Kadhafi, car un procès devant la Cour pénale internationale aurait été gênant, selon les révélations du Canard Enchaîné du 26 octobre. Selon l'hebdomadaire satirique français, un colonel du Pentagone aurait confié aux services secrets français le 19 octobre qu'il était impossible de «manquer» Kadhafi, avant d'ajouter que le laisser en vie ferait de lui «une véritable bombe atomique». Au lendemain de ce coup de fil, Paris et Washington auraient donc participé à la chasse au guide libyen, non seulement en bombardant le convoi de 75 voitures dans lequel il fuyait avec un drone américain Predator et un Mirage 2000-D français, mais aussi envoyant sur place une unité spéciale française pour assister celles du Conseil National de Transition (CNT). En effet, selon des officiers du Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO) ou encore le Service action de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), une cinquantaine de militaires du commandement des opérations spéciales (COS) étaient présents à Syrte pour «traiter le Guide libyen et les membres de sa famille» (selon le jargon d'un officier du CPCO). Le rôle exact de ces forces spéciales n'est pas clair, mais certains de ses membres auraient été témoins du lynchage de Kadhafi. Hypothèse avancée par l'abondance de détails racontés par un officier des renseignements militaires : «Il est capturé vivant par des combattants surexcités. La foule scande Allah Akbar à pleins poumons, le menace de ses armes et se met à le tabasser pendant que d'autres combattants, qui peinent à prendre le dessus, crient de le maintenir en vie.» La mort par balle du dictateur libyen, le matin du 20 octobre, aurait été un soulagement pour les services français et américains, comme en témoignent les propos d'un diplomate français : «La peine de mort n'était pas prévue par les résolutions de l'ONU qui ont transmis à l'Otan d'intervenir. Mais il ne faut pas jouer les hypocrites. A plusieurs reprises, des avions français et britanniques avaient déjà tenté de liquider Kadhafi en bombardant certains de ses repaires à Tripoli, ou en détruisant l'un de ses bureaux». Le diplomate ajoute que dans l'éventualité d'un procès international, «ce nouvel ami de l'Occident (Kadhafi) aurait pu rappeler ses excellentes relations avec la CIA ou les services français, l'aide qu'il apportait aux amis africains de la France, et les contrats qu'il offrait aux uns et aux autres. Voire plus grave, sait-on jamais?»