Pour plaisanter, à chaque rencontre, feu Bachir Boumaâza, ancien président du Conseil de la nation, lui lançait : «Moi, je suis militant de la cause palestinienne avant toi !» Lui, c'est Yassir Arafat (1929-2004). Boumaâza, dans les années 1950, participait lors d'un chargement d'armes au port de Marseille (France) à destination de la Palestine occupée quand Arafat, son cadet de deux ans, était étudiant à l'université Fouad Ier du Caire. Le futur président de l'Autorité palestinienne avait de nombreux amis à Alger qu'il a côtoyés au cours de sa longue lutte pour l'indépendance de son pays dans les limites territoriales de 1967, avec Al Qods comme capitale et le retour des réfugiés. «Yasser Arafat avait des relations fortes et privilégiées avec l'Algérie», a déclaré hier l'ambassadeur palestinien Hussein Abdelkhaleq au forum du quotidien El Moudjahid. L'ambassadeur s'est exprimé à la fin d'une cérémonie organisée par ses services et l'association Machaâl Al-Chahid pour marquer le 23e anniversaire de la proclamation, à partir d'Alger de l'Etat palestinien (15 novembre 1988). C'était également l'occasion de rappeler le parcours de Abou Ammar, nom de guerre de Arafat, disparu le 11 novembre 2004. Il n'est un secret pour personne que la résistance palestinienne s'est inspirée dans son combat de la guerre d'Algérie. «Arafat a visité l'Algérie avant 1965. Il a conclu à la nécessité de déclencher la guerre après la réussite de la révolution algérienne. Lors de ce voyage, il a rencontré le ministre de la Défense Houari Boumediene auquel il a présenté les plans des résistants palestiniens. Boumediene lui a dit : «Va et tire la première balle et tu auras toute l'aide et toute l'assistance de l'Algérie», a assuré M. Hussein. Arafat a regagné son pays et il a tiré «la première balle» en 1965. Depuis, la position d'Alger sur la question n'a pas changé : «L'Algérie est avec la Palestine, oppresseur ou oppressé». Dans les territoires occupés, la réalité demeure toutefois la même : 23 ans après sa proclamation, l'Etat palestinien n'est toujours pas reconnu comme tel par l'Organisation des nations unies (ONU). La population à Ghaza, à Al Qods ou ailleurs subit comme d'habitude les interventions militaires israéliennes au milieu d'un silence complice de la communauté internationale. Les Palestiniens ont officiellement demandé en septembre dernier au Conseil de sécurité de l'ONU de leur reconnaître la qualité de membre à part entière de l'organisation, après avoir conclu que les négociations de paix avec les Israéliens étaient jusqu'ici un échec, précise l'ambassadeur. La voie diplomatique reste ouverte, nuance-t-il, pour peu que les discussions soient fondées sur le retour de l'Etat hébreu à la légalité internationale (application des résolutions de l'ONU), l'arrêt total de la colonisation et la définition d'un agenda précis pour les négociations. Selon lui, la composante actuelle du Conseil de sécurité constitue une entrave majeure au gouvernement de Mahmoud Abbas dans sa démarche en vue d'arracher ce statut d'Etat-membre. Mais le combat continue. Avant l'intervention de Hussein Abdelkhaleq, les invités à la cérémonie ont assisté à un défilé à la tribune de militants et cadres du parti du Premier ministre Ahmed Ouyahia, le Rassemblement national démocratique (RND). Les rôles sont bien partagés. La rencontre a été en effet inaugurée par le président de l'APC d'Alger-Centre, Tayeb Zitouni. Selon lui, «un Etat se construit par la résistance». Seddik Chihab, vice-président de l'Assemblée populaire nationale (APN) et membre du bureau politique du RND, a réaffirmé le soutien indéfectible de l'Algérie à la cause palestinienne. Profitant de la présence dans la salle de plusieurs ambassadeurs, il a lancé un appel «aux pays amis» de multiplier les actions diplomatiques en vue d'aider à l'adhésion de l'Etat palestinien à l'ONU. «La libération de la Palestine passe par l'unité des Palestiniens», affirme-t-il. De son côté, la présidente de l'Union nationale des femmes algériennes (UNFA), Mme Nouria Hafsi, a mis en garde les pays arabes contre tout oubli ou négligence de la cause des palestiniens qui pourraient leur être fatal, dans le sillage des bouleversements que connaît la région depuis le début de l'année en cours. Noureddine Benbrahem, commandant général des Scouts musulmans algériens (SMA) s'est dit quant à lui convaincu que le règlement du conflit dépend en grande partie des rapports de force qui s'affrontent sur le terrain et auxquels la question des droits de l'homme reste étrangère.