La classe politique algérienne a vivement réagi aux déclarations du Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan qui a rappelé à la France le génocide qu'elle a commis en Algérie. Les partis politiques déterrent le dossier de la reconnaissance par la France de ses crimes en Algérie et la question de la repentance qui a été étouffée par le gouvernement. «Cela va de soi. C'est tout à fait normal que le Premier ministre turc lance ce genre de propos à la France vu tout ce qu'elle a commis comme crimes contre l'humanité durant sa présence en Algérie», a indiqué hier Mohamed Djemâa, porte-parole du MSP. «On aurait aimé que ce soit une position de principe et non une position conjoncturelle qui intervient en réaction au vote d'une loi au Parlement», a-t-il ajouté. Le MSP a saisi cette occasion pour interpeller le gouvernement sur la nécessité «de demander à la France de reconnaître ses crimes commis durant la période coloniale, de présenter des excuses au peuple algérien et d'exiger une réparation morale, politique et financière pour les victimes». Selon lui, «la France doit être conséquente avec elle-même en procédant à la criminalisation du génocide algérien au même titre que ce qu'elle a fait avec le crime arménien, loin des objectifs électoralistes», a précisé M. Djemâa. Pour sa part, Moussa Touati, président du FNA, a salué les propos du Premier ministre turc : «Nous le remercions pour sa position et ses propos. Il a défendu la cause nationale. Nous lui devons le respect», a-t-il dit. Il reproche au gouvernement d'avoir empêché l'initiative parlementaire visant à criminaliser les crimes commis par la France d'aller jusqu'au bout de son objectif. «Au lieu que ce soit le gouvernement algérien qui défende la cause nationale et fasse en sorte de répondre aux revendications populaires en exigeant de la France de reconnaître ses crimes, c'est le Premier ministre turc qui se met à le faire. C'est regrettable», a-t-il indiqué. «Le Parlement a essayé de le faire mais il a été empêché par le gouvernement», rappelle-t-il. «Cela relève du droit historique de notre pays et c'est à nous de demander cela pour montrer le vrai visage de la France coloniale qui n'a eu aucun respect pour les droits de l'homme». Les déclarations de M. Erdogan s'inscrivent dans le cadre logique de «la nécessité pour la France de reconnaître tous les crimes commis dans ses anciennes colonies», dira de son côté Kassa Aissi, porte-parole du FLN. «C'est un fait historique avéré», a souligné le porte-parole du vieux parti. «Nous souhaitons que cela soit le point de départ à un courant international pour la condamnation de toutes les exactions commises par les anciennes colonies en Afrique, en Asie et en Amérique latine», dira-t-il. En Algérie, «cela constitue déjà une position de principe et une revendication populaire qui réclament la reconnaissance juridique». Le porte-parole du FLN estime que l'utilisation de ces événements tragiques à des fins électorales ne doit pas nous faire oublier la justesse de notre cause. Kassa Aissi rappelle que «la France a commis des massacres affreux durant la période coloniale. Ils ont été entrecoupés par des représailles contre les révolutions populaires. Les traces des massacres du 8 Mai 1945 qui ont fait 45 000 morts sont toujours visibles à Kherrata. 8000 villages ont été rasés, 1,5 million de personnes mises dans les camps de concentration, en plus des exilés, des personnes torturées et celles qui continuent de mourir sous les explosions des mines enracinées sur le sol algérien. Au jour d'aujourd'hui, des milliers de personnes souffrent des radiations atomiques», a-t-il rappelé. «Il s'agit d'une question franco-turque et l'Algérie a été citée comme exemple dans le discours du Premier ministre turc», estime Miloud Chorfi, porte-parole du RND. Le parti d'Ahmed Ouyahia estime que «la position officielle de l'Algérie est exprimée par le ministère des Affaires étrangères (...) Notre parti politique suit la position officielle», a déclaré Miloud Chorfi.