Les Accords d'Evian conclus par le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) et le gouvernement français, le 19 mars 1962, constituent un compromis historique "nettement favorable" au peuple algérien qui lui a permis de s'exprimer librement à travers un référendum d'autodétermination arraché de hautes luttes, a indiqué l'historien et sociologue algérien, M. Hassen Remaoun. "Ces Accords représentent un compromis historique nettement favorable au peuple algérien qui lui ont permis de s'exprimer librement pour l'indépendance de son pays, à travers un référendum d'autodétermination arraché de hautes luttes, depuis la résistance et le mouvement national jusqu'à la guerre de l'indépendance", a affirmé l'historien Remaoun dans un entretien accordé à l'APS, à la veille du 50e anniversaire de la signature de ces Accords. Il s'agit, pour M. Remaoun, d'une victoire "importante" pour la société algérienne qui a beaucoup consenti, le long de 132 ans de colonisation, pour le recouvrement de son indépendance et de sa souveraineté nationale. Cette victoire, a-t-il encore soutenu, est d'une valeur "inestimable", d'autant plus, a-t-il expliqué, qu'il fallait convaincre l'opinion internationale de la justesse de la cause algérienne, faire face aux forces extrémistes de la colonisation qui sévissaient en Algérie et remettre en cause cette fiction nourrie pendant plus d'un siècle par le colonialisme, à savoir "l'Algérie est un département français". Après 50 ans, a relevé M. Remaoun, le peuple algérien "peut constater les résultats positifs obtenus", suite à ces Accords ayant permis, a-t-il expliqué, au jeune Etat algérien de "renégocier certaines dispositions dans un nouveau rapport de force". Répondant à une question relative aux divergences suscitées par ces Accords au sein de la partie algérienne, notamment, entre l'Etat-major de l'Armée de libération nationale (ALN) et le GPRA, ce chercheur du Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC), a expliqué ce "clivage" par cette "radicalisation" caractérisant les militants nationalistes et qui s'est cristallisée au sein du mouvement national algérien le long du processus de sa formation. "Une partie du mouvement de libération nationale n'a pas compris le sens de ce compromis avec le colonialisme", a-t-il soutenu, ajoutant que cette forme de radicalisation "est héritée de l'Organisation spéciale et des conditions du déclenchement de la guerre de libération nationale". Il a estimé, dans le même cadre, que cette radicalisation s'exprimait "essentiellement" à travers cette thèse partagée par un nombre de révolutionnaires algériens qui croyaient que "l'indépendance ne peut s'obtenir qu'à travers la lutte armée". Il a toutefois reconnu que la délégation algérienne à Evian, conduite par le vice président du GPRA, le défunt Krim Belkacem, avait réussi à arracher l'essentiel, à savoir l'indépendance de l'Algérie et l'intégrité du territoire national". La fin du mythe de l'Algérie française "Grâce à sa Révolution, le peuple algérien a pu surtout casser la fiction de +l'Algérie française+", a-t-il souligné. M. Remaoun a indiqué, dans le même sens, que plus tard "l'Etat algérien a su récupérer l'intégrité de son territoire national, en reprenant la base navale de Mers El Kebir, la base aérienne de Bousfer et les sites militaires de Reggane et Hammaguir". ''Comme elle (l'Algérie) a pu, a-t-il poursuivi, nationaliser son pétrole qui était au centre des appétits de l'ancien colon qui a cherché, le long des négociations d'Evian, à garder le Sahara algérien sous sa souveraineté''. Pour ce chercheur du CRASC, l'Algérie avait décidé, quelque années plus tard, de mettre en oeuvre une ''politique de développement basée sur la valorisation de ses richesse nationale qui faisaient partie de sa souveraineté nationale''. C'est ce qu'il l'a amené à considérer que certaines dispositions de ces Accords avaient subi ''les effets de l'évolution historique en Algérie''. S'agissant de la violence ayant éclaté durant la période allant de la proclamation du cessez-le-feu, le 18 mars 1962, à la proclamation de l'indépendance de l'Algérie, le 5 juillet 1962, M. Remaoun les a attribué ''au retrait de l'Armée coloniale des villes et villages''. Pour lui, il s'agit d'une période de "flottement", résultant de l'attitude passive de l'Armée coloniale qui a été mise, a-t-il dit, ''en difficulté par les agissements de l'extrême droite, des colonialistes extrémistes et surtout par les contradictions qui s'exprimaient en son sein, notamment, après la tentative de coup d'Etat avorté, une année auparavant''. M. Remaoune a également souligné, à ce sujet, que la violence s'est exprimée dans les zones où l'OAS et les harkis avaient sévi d'une manière "effroyable" et ou encore dans des zones où des pilleurs avaient exploité ''l'absence d'une autorité pour commettre leurs forfaits''. "Dire que le FLN était à l'origine de ces violence, n'est pas évident", a-t-il soutenu, affirmant que sur cette question, "le FLN a pu, plus au moins, se contrôler durant la période allant du cessez-le-feu au référendum d'autodétermination".