La direction de l'USM Alger a organisé hier après-midi, au stade de Bologhine, une conférence de presse pour expliquer les démarches qu'elle a entreprises à la suite de l'agression dont a été victime son équipe seniors samedi dernier à Saïda. Etaient présents à cette conférence le vice-président de la SSPA, Rebbouh Haddad, un membre du conseil d'administration, Mohamed Hakem, l'entraîneur de l'équipe, Meziane Ighil, le secrétaire administratif, Abdallah Cherchar ainsi que deux joueurs, à savoir Nassim Bouchema et Nasreddine Khoualed. «On a défié l'autorité de l'Etat» Le premier à s'exprimer a été Mohamed Hakem pour qui «il n'y a pas eu de mort mais cela ne diminue en rien la gravité des faits. Je tiens à remercier la presse pour la couverture de cette agression et de lui avoir donné l'écho qu'elle méritait. Sans la presse, on n'aurait rien su de cette véritable boucherie. Il n'y avait aucune caméra dans le stade et les commanditaires de cet acte inqualifiable voulaient qu'il n'y ait aucun témoignage. L'USMA exige des sanctions à l'encontre des commanditaires et des auteurs à la hauteur de ce qui s'est passé. Les responsabilités doivent être situées mais aussi la passivité complice du service d'ordre dont la mission était pourtant la sécurité de tous. L'USMA interpelle les instances dirigeantes du pays et celles du sport pour qu'elles réagissent car ce qui s'est passé à Saïda n'est ni plus ni moins qu'un défi à l'autorité de l'Etat. On ne peut plus continuer de la sorte avec des dirigeants de club qui croient qu'un match se gagne par l'intimidation et dans les couloirs des stades. La saison dernière, l'USMA a toujours été dans les 5 dernières places du classement et n'avait sauvé sa place en Ligue 1 que lors de l'ultime journée. Jamais notre club n'était tombé dans le piège de l'attitude antisportive. Notre vœu est que de tels évènements ne se reproduisent plus et que ce qui s'est passé à Saïda soit un choc pour réveiller les esprits et les amener à prôner la sportivité dans tous les stades d'Algérie.» «Il serait souhaitable que le championnat se termine à huis clos» De son côté, Rebbouh Haddad a fait savoir que son club a saisi les instances dirigeantes du football algérien mais également la DGSN «pour élever une vive protestation sur l'attitude du commissaire de police qui a officié samedi dernier au stade de Saïda. Il n'a rien fait pour protéger nos joueurs, leurs accompagnateurs et leurs supporters. Sa passivité a encouragé les agresseurs à accomplir leur basse besogne. Ce que je peux dire c'est que l'USMA dérange et suscite des jalousies. Nous avons un grand projet pour elle et il sera mené à terme quelles que soient les circonstances. Aujourd'hui, nous nous retrouvons avec des joueurs blessés et indisponibles. Ce n'est pas ça qui va nous décourager. L'équipe va continuer à jouer avec les espoirs, avec les juniors voire les cadets. Ce qui serait souhaitable, c'est que le huis clos soit instauré dès maintenant pour le reste de la saison et pour tous les matches car le danger de la violence est là bien présent.» «Le sang qui a coulé ne l'aura pas été pour rien» Troisième à intervenir, Meziane Ighil, dont la main gauche était plâtrée, pour qui «ce qui s'est passé à Saïda était prémédité. Il y a eu des agresseurs mais le plus important est de connaître les commanditaires. Cela fait 48 ans que je suis dans le milieu du football. Il m'est souvent arrivé d'être pris dans des incidents dans un stade mais jamais je n'ai connu un tel degré de férocité et de haine comme ce que j'ai vécu à Saïda. Je dis prémédité parce qu'en arrivant au stade, les attaques ont commencé. Ceux qui étaient, soi-disant, chargés de nous encadrer, une quarantaine de gens vêtus de chasubles, étaient ceux qui nous agressaient. Quand je suis allé voir l'arbitre pour le mettre au courant de ce que nous venions de subir, il m'a répondu que lui aussi avait été agressé à son arrivée au stade. Le match n'avait même pas commencé et nous venions de subir des attaques physiques et verbales de tout genre. Au moment où le match allait débuter, je n'ai pas manqué de voir les 40 voyous vêtus de chasubles sensés être notre comité d'accueil accéder dans la tribune présidentielle où ils ont pris place et enlevé ensuite leurs chasubles. A la mi-temps, ils les ont remis, sont redescendus sur le terrain et sont venus jusqu'à nous pour continuer à nous intimider, à nous frapper et à nous insulter. Je pressentais le pire et j'avais demandé à tous les joueurs de rejoindre le centre du terrain dès que l'arbitre siffle la fin du match. Quand nous avons égalisé à la dernière minute, certains de nos joueurs sont allés vers nos supporters pour manifester leur joie. A un certain moment, comme nous n'avions plus de nouvelles de ces joueurs, nous avions craint le pire. Grâce à Dieu, nous avons appris par la suite qu'ils avaient accédé à la tribune pour aller se cacher au milieu des supporters de l'USMA qui ont pris des coups à leur place. Pour ce qui est du vestiaire de l'USMA, ce n'était plus un vestiaire de sportifs mais un abattoir, tellement il y avait du sang partout. Vers 22h, nous avons reçu la visite du wali de Saïda qui était accompagné du président du MCS. J'ai dit à ce wali qu'en tant qu'entraîneur, j'ai 30 joueurs sous mes ordres qui m'obéissent au doigt et à l'œil. C'est cela l'autorité que j'aurais voulu voir appliquer pour protéger l'USMA de ces barbares. Au vu de tout ce qui s'est passé avec des agresseurs à qui on a livré le stade et des policiers impassibles, j'ai le sentiment que tout cela était prémédité. J'ai l'impression que quelque part on a dit à ces agresseurs : «On vous laisse le stade et l'USMA, mais laissez-nous en paix. Pour ce qui est de la suite, la vie continue. Il ne faut jamais céder à la terreur et à la bêtise. L'USMA va retourner au travail et jouer ce qui lui reste à jouer. Mais qu'on le sache, elle jouera avec encore plus de volonté et de détermination pour que le sang qui a coulé ne l'aura pas été pour rien.» «L'Algérie est ainsi faite» Tête et nez bandés, Abdallah Cherchar, secrétaire de l'équipe, s'est exprimé pour apporter quelques précisions, notamment sur des policiers qui lui auraient affirmé : «On nous a donné des ordres de ne pas intervenir ni de frapper. J'ajoute que dès notre arrivée au stade, j'avais senti qu'on nous avait préparé un guet-apens car c'est la première fois que le bus de l'USMA est empêché d'entrer dans l'enceinte du stade à Saïda. Ensuite, j'ai été frappé par le fait qu'un responsable du stade vienne me demander de lui donner les licences des joueurs et des accompagnateurs pour, selon lui, vérifier qui allait entrer au vestiaire. Comme j'ai refusé de m'exécuter, j'ai essuyé une pluie d'injures. J'ai même été agressé. Quand j'ai demandé au commissaire de police d'intervenir pour que cesse le carnage, il m'a répondu : «Je ne peux rien faire. L'Algérie est ainsi faite.» Ce qui m'a choqué c'est qu'à un certain moment, le commissaire en question est entré dans le vestiaire de l'arbitre. Il en est ressorti 5 minutes plus tard et immédiatement après le 4e arbitre m'a demandé de lui amener les licences. Cela voulait dire que le match allait avoir lieu alors que le délégué du match n'était pas encore arrivé. J'avais pourtant averti l'arbitre du danger qui pesait sur nous. Il m'avait répondu qu'une décision sera prise sur la suite des évènements dès que le délégué sera là. Pourquoi alors précipiter les choses et ne pas attendre l'arrivée de ce délégué ? Et sachez qu'à la mi-temps, cet arbitre, ce délégué et les assesseurs ont été agressés et ont été protégés par nous. Je tiens également à préciser que les joueurs du MCS n'ont rien à voir avec tous ces incidents.»