Il est très difficile d'annoncer la maladie du cancer à une personne atteinte ainsi qu'à sa famille. Cette maladie est décrite par les patients comme «un séisme», «une bombe» ou «un trou noir», ont relevé des spécialistes du Centre national de lutte contre le cancer Pierre et Marie Curie (CPMC) à l'occasion de la 5e journée d'onco-psychologie, sous le thème «Le cancer entre Eros et Thanatos» (pulsion de vie et pulsion de mort), organisée jeudi à Alger. Mais le plus regrettable, de l'avis des spécialistes, c'est le fait que «le CPMC ne dispose pas de moyens suffisants pour accomplir la mission d'accompagnement des cancéreux». Ils expliquent que l'accompagnement doit être assuré durant toute la période de la maladie et même après la guérison afin d'éviter aux malades la dépression. Des efforts sont certes déployés par les psycho-oncologues et les psychologues, mais ils restent insuffisants devant le grand nombre de malades qu'accueille quotidiennement le CPMC, d'où «l'urgence d'accélérer la réalisation de nouveaux centres régionaux de lutte contre le cancer». «Il y a 20 ans, nous parvenions à accompagner une dizaine de malades par jour, mais actuellement, nous n'arrivons plus à répondre à la forte demande», s'inquiète le Dr Zina Fettouchi Oukkal, onco-psychologue au service d'oncologie du CPMC. En 2011, l'Algérie a enregistré notamment 9000 nouveaux cas de cancer du sein alors qu'on dénombre entre 1000 et 1500 nouveaux cas d'enfants atteints par an, s'alarment les spécialistes. Au sujet du manque de moyens, les spécialistes regrettent avoir annoncé parfois la nouvelle aux parents d'enfants malades dans les couloirs. Et ce, parce que «nous ne disposons pas de bureaux où les recevoir», dénonce une pédiatre. La formation de psychologues spécialisés, la création de la spécialité de psycho-oncologie, la dotation du CPMC en moyens appropriés et l'augmentation des effectifs sont autant de propositions préconisées conjointement par les médecins spécialistes et les psychologues afin d'éviter aux malades de sombrer dans la dépression et l'isolement et par là même les aider à disposer d'une qualité de vie meilleure et bénéficier d'un accompagnement pour une réinsertion sociale et professionnelle. L'aide aux cancéreux en fin de vie est aussi importante, ont noté les spécialistes qui mettent l'accent sur l'assistance des familles des enfants cancéreux. «L'accompagnement psychologique des cancéreux est indispensable», insistera le Dr L. Douaouda, psychologue au service de traumatologie et au CHU Mustapha Bacha. De son côté, le Dr Zina Fettouchi Oukkal a plaidé pour «valoriser la spécialité d'onco-psychologie qui a sa place dans le milieu hospitalier». Certes, a-t-elle ajouté, «la maladie est souvent associée à la mort, mais il est important de donner espoir aux cancéreux qui peuvent guérir et reprendre une vie normale». Pour les personnes âgées atteintes, des travaux de recherches sont menés à travers des thèses de magistères notamment. La création d'un centre spécialisé pour accueillir ces malades du 3e âge est suggérée également. Ce projet, proposé depuis une vingtaine d'années par l'Association d'aide aux cancéreux El Fedjr, pourra aider des dizaines de malades auxquels leurs familles ne peuvent pas garantir de bonnes conditions de vie.